En français dans le texte

Si j’en crois les journalistes « professionnels de la profession », il y avait comme un air de « déjà vu »* dans le discours de la Sorbonne numéro deux prononcé hier par le président de la République pour marquer son entrée en campagne électorale et tenter de ravigoter une majorité relative à la peine dans les sondages. L’existence même de ce discours suffit à démontrer la faiblesse de la liste conduite par une candidate inconnue du grand public et dont les orientations ne sont pas clairement identifiées. Emmanuel Macron a tenté de retrouver une dynamique et un élan qui lui ont permis de remporter la présidentielle il y a 7 ans.

Pour y parvenir, le président a cru bon de dramatiser les enjeux de l’élection du 9 juin prochain, en mettant en garde contre la mort possible de « notre Europe ». C’est ce qui s’appelle jouer sur tous les tableaux. L’argument reste bel et bien, comme en 2017 : « plus européen que moi, tu meurs », avec un corollaire implicite qu’il essaye d’imposer dans le débat public : moi, ou le chaos. Ce qui pouvait fonctionner à la rigueur avec la personnalité de Charles de Gaulle est devenu à peu près inaudible pour son lointain successeur qui a endossé un costume trop grand pour lui. Les électeurs sont malheureusement de plus en plus tentés par l’aventure populiste du Rassemblement national comme le montrent les études d’opinion, sondage après sondage. La stratégie du pouvoir consiste depuis de nombreuses années à installer un duel entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen en partant du principe que l’épouvantail de l’extrême droite fera toujours battre son ou sa candidate. De nos jours, ce pari risqué a de fortes chances d’être perdu, et le plafond de verre n’est plus indestructible avec la disparition du « front républicain ».

À force de jouer avec le feu et de courir derrière les thèses funestes du Rassemblement national, le parti présidentiel a simplement réussi à banaliser et même respectabiliser les leaders de l’extrême droite, qui pérorent désormais d’égal à égal avec les ténors du gouvernement en se gardant de tout excès de langage. En entrant aussi visiblement dans la campagne, le président se met au niveau de ses adversaires, alors même qu’il croit prendre de la hauteur. Inefficace vis-à-vis de l’opinion intérieure, qui est sommée de soutenir le Président en toutes circonstances, ce discours est apparu dans les pays de la Communauté européenne comme une nouvelle manifestation de l’arrogance dont notre pays est régulièrement accusé. Sous prétexte de faire avancer l’union, Emmanuel Macron avance des positions sans prendre la peine de la concertation, agaçant ainsi nos partenaires, avec des déclarations intempestives.

*En français dans le texte