La mouche du coche
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 29 juin 2023 10:25
- Écrit par Claude Séné
Depuis l’épisode interminable du feuilleton des retraites, le président semble chercher désespérément une porte de sortie à ce chemin montant, sablonneux et malaisé qu’il a dû emprunter du fait de son entêtement maladif à mener ce chantier injuste et superflu. Comme la mouche de la fable, il s’agite en tous sens dans l’espoir de faire oublier cette fâcheuse péripétie à laquelle son orgueil l’a empêché de renoncer quand il en était encore temps. Son déplacement en majesté dans la lointaine province marseillaise faisait partie de son plan de reconquête de l’opinion, et il permettait d’occuper le terrain médiatique.
La difficulté de cet exercice tient dans le contenu plus que dans la forme. On peut toujours rameuter les derniers sympathisants, éloigner les contestataires, confisquer les casseroles, pour permettre au chef de l’état de faire le beau, de prendre des bains de foule savamment orchestrés, et de briller en société grâce à des petites phrases préparées par des professionnels. C’est un exercice qu’il adore, et où il est plutôt bon. Sans compter qu’il aura toujours le dernier mot contre un interlocuteur qui se montrerait pugnace. On l’a déjà vu à l’œuvre dans les crises précédentes, où il a fini par s’en sortir grâce à ce que les jeunes appellent la tchatche. Depuis la promulgation de la loi sur le recul de l’âge de départ à la retraite et les deux années volées aux Français, il a lancé plusieurs ballons d’essai : le service national universel, le permis de conduire à 17 ans, la rénovation des écoles et de l’habitat, j’en passe et des moins mûres, et, cerise sur le gâteau, il a déterré un marronnier sous la forme d’une réduction des vacances scolaires d’été. Un bon sujet de polémique, avec des intérêts contradictoires, lancé à une période stratégique.
Rien de tel en effet pour détourner l’attention que de reprendre un débat vieux comme l’école, sur lequel les gouvernements antérieurs se sont cassé les dents. Ici, pas de risque pour le ministre en exercice, Pap N’Diaye, qui semble n’avoir même pas été informé de l’initiative présidentielle. Pour faire bonne mesure, le projet, qui sera probablement remisé aux calendes, si toutefois il voit le jour, est habillé d’un objectif social imparable : il permettrait de réduire les inégalités dues aux milieux défavorisés. Qui peut être contre ? À part les professionnels du tourisme, les familles recomposées, les climatologues, ou plus simplement les mauvais coucheurs, qui sont plus de 68 millions à présent en France au dernier recensement, sans compter les sujets de mécontentement. Bref, le plan était plus que parfait. Il aura fallu qu’un grain de sable vienne enrayer cette belle mécanique et réduire à néant les efforts des propagandistes gouvernementaux : la mort de Nahel, qui met le feu aux poudres dans les banlieues, créant une situation dont nul ne sait à quoi elle peut aboutir.