Haro sur Hidalgo
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 14 mars 2023 10:27
- Écrit par Claude Séné
L’intersyndicale avait promis de mettre le pays à l’arrêt. Quelques jusqu’au-boutistes avaient même exhorté les salariés à la mettre « à genoux », ce qui avait permis aux extrémistes du gouvernement d’ouvrir un procès en activisme sinon en sorcellerie, sans grand succès cependant. Il s’agissait de faire passer les manifestants pacifiques pour de dangereux terroristes prêts à tout pour nuire aux « honnêtes gens », les seuls à se lever tôt et à soutenir la France qui travaille. Avec le développement du télétravail, et tant que l’essence ne manque pas, les gens ont continué à travailler, presque comme si de rien n’était.
Le bon côté de la situation, c’est que la popularité du mouvement ne se dément pas, mais le mauvais, c’est que le pouvoir semble s’en foutre royalement. Tout juste si Brigitte ne suggère pas de manger de la biscotte, faute de pain. On sait bien que les mouvements sociaux doivent déranger, et sérieusement, pour que les dirigeants daignent y prêter attention. Et c’est un élément inattendu qui cristallise la manifestation du mécontentement populaire, car, précisément, il ne touche pas que le « populo ». Les montagnes d’immondices qui s’accumulent sur les trottoirs de Paris, Nantes, Marseille et la plupart des grandes villes défigurent le paysage y compris dans les beaux quartiers. Que la ville soit moche dans les quartiers populaires, ça ne gêne pas les puissants de ce monde, ce n’est pas là qu’ils habitent. Par contre les tas d’ordures qui débordent des poubelles dans le 16e arrondissement, c’est insupportable.
Comme il est difficilement niable que les éboueurs sont fondés à s’opposer à un rallongement de leur carrière avant de partir en retraite, sachant qu’ils ont un déficit de vie de 12 à 17 années sur le commun des mortels, il faut bien trouver un bouc émissaire. Et ce sera la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a eu le malheur aux yeux de la droite de soutenir les employés municipaux en grève, qui en fera office. Tout est de sa faute, et elle doit réquisitionner, casser la grève, faire appel au privé, aller vider elle-même les poubelles des beaux quartiers, n’importe quoi pourvu que les grands bourgeois ne soient pas incommodés. Les éboueurs sont pourtant clairs. Que le gouvernement retire son texte de loi sur les retraites et ils se remettent au travail. Les beaux esprits qui se bouchent le nez pour rentrer chez eux entre deux murs de sacs-poubelle, oublient volontairement que le fait générateur de cette grève n’est pas imputable à Anne Hidalgo, mais à la précipitation qui a poussé Emmanuel Macron à présenter coûte que coûte sa réforme, au mépris de toute procédure de négociation réelle avec les salariés et leurs représentants, opposés à 93 % à cette amère pilule, qu’il n’essaie même plus de dorer, laissant libre cours à un autoritarisme déplacé.
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