La guerre à crédit

Ben oui ! une guerre, ça coûte cher. Si ce brave Wladimir n’avait, comme nous, pas de pétrole, mais seulement des idées de conquête, il ne tiendrait pas très longtemps avec son plan d’épargne logement en roubles dont personne ne semble vouloir en ce moment. Surtout que les logements en bon état, en Ukraine, sont aussi difficiles à trouver qu’un deux-pièces à Beyrouth au plus fort de la guerre. Heureusement, les gouvernements qui critiquent le plus le dictateur russe continuent à lui acheter ses matières premières, 700 millions par jour, parait-il. C’est comme si on lui achetait directement des missiles à envoyer sur les populations civiles.

On le sait bien depuis que Coluche en a fait un sketch, c’est le crédit qui est cher, pas la maison. Avec Poutine, lui faire crédit, c’est même hors de prix. Pire que les maisons en préfabriqué, qu’il faut réparer pendant que ça s’écroule, et dont, au bout de 15 ans, les ruines sont à toi. Là, c’est pareil. Les Ukrainiens font des pieds et des mains pour rester en vie pendant que les Occidentaux leur envoient des sparadraps et continuent à financer la guerre en attendant que Poutine en ait assez de leur cogner dessus. Un peu comme ce manager de boxe qui encourage son poulain entre deux rounds en lui disant que son adversaire commence à se fatiguer de lui en mettre plein la tête. Les gouvernements comptent sur le sens moral des entreprises pour priver l’agresseur russe de subsides, mais ne donnent pas beaucoup l’exemple. Le résultat, c’est que si les Russes risquent d’être privés de Mac Do et de cola, les affaires les plus sérieuses, c’est-à-dire lucratives, continuent pendant les massacres. Total énergie va cesser progressivement d’acheter le pétrole russe, mais continuera d’importer le gaz. Tout se passe comme si le commerce passait avant toute considération morale et que tout était préférable au risque d’une 3e guerre mondiale.

Dans ces conditions, les harangues du président ukrainien, y compris quand il s’adresse au parlement français, font l’effet d’un prêche dans le désert. À l’approche de l’élection présidentielle, on se prend à penser que Volodymyr Zelenski aurait dû se présenter en France. Comme on a pu le dire, à tort, à propos de la Palestine, un peuple sans terre s’installant dans une terre sans peuple, la France aurait besoin d’un président de la trempe de cet acteur révélé par le rôle de sa vie, et le président Zelensky, qui risque de se retrouver privé de son pays, écrasé sous les bombes, pourrait apporter son courage et des options claires qui nous font cruellement défaut. Contrairement au président sortant français, Zelensky semble connaître son peuple, en faire partie, partager son quotidien et conserver des réflexes démocratiques malgré les difficultés de la situation actuelle, en souhaitant consulter ses concitoyens par référendum, dès que ce sera possible.