Handicap : les équilibristes

15 ans après la loi de 2005 voulue par Jacques Chirac, Emmanuel Macron va présider une Conférence nationale du handicap, que la Secrétaire d’État chargée du dossier, Sophie Cluzel, devait vendre sur France Inter. L’exercice est périlleux, et exemplaire de la difficulté de soutenir des positions contradictoires quand on appartient à ce pouvoir du « en même temps ». Il s’agissait d’un côté de vanter et mettre en valeur l’action de son gouvernement, tout en insistant, de l’autre, sur des projets d’améliorations spectaculaires d’une situation qui ne serait pas si formidable que ça.

Cela s’entendait au ton employé par la Secrétaire d’État, parfois revendicatif, comme si elle se trouvait dans l’opposition, exprimant malgré elle toute la frustration qu’elle doit éprouver si elle est un tant soit peu sincère, en voyant la lenteur des progrès accomplis et l’immensité du chantier qui l’attend et qu’attendent les familles avec plus ou moins d’impatience. Il s’agit de passer des droits théoriques des personnes en situation de handicap à leur application concrète. La nouvelle loi devrait laver plus blanc que blanc, comme le nouvel Omo qui ouvrait des abimes de perplexité chez Coluche. Sophie Cluzel reconnait à demi-mot que vouloir la scolarisation de tous les enfants en milieu scolaire ordinaire est un objectif louable, mais que nous sommes encore loin du compte, si tant est que ce soit tout simplement possible. Cela passerait par une formation spécifique de tous les enseignants, l’adaptation de tous les locaux scolaires, le recrutement, la formation et le financement d’emplois spécialisés en nombre suffisant pour accompagner les enfants, c’est-à-dire un budget extrêmement conséquent, qui ne sera pas compensé par des économies sur les structures spécialisées qui resteront indispensables pour certains types de handicap. Pire encore, il faudra créer de nouvelles places en grand nombre pour rattraper le retard pris dans les infrastructures, qui pousse plusieurs milliers de familles à devoir scolariser leurs enfants en Belgique.

Il est malheureusement à craindre que la conférence qui s’ouvre ne débouche que sur de nouvelles déclarations de bonnes intentions, des positions volontaristes où la bonne volonté et le dévouement devraient comme d’habitude suppléer le manque criant de moyens. C’est ce que j’entends entre les lignes quand on promet d’œuvrer pour que les bonnes volontés au sein des associations coordonnent mieux leurs efforts. Je sens que le gouvernement de la poudre de perlimpinpin va encore sortir son stock de bouts de ficelle à défaut de délier les cordons de la bourse. La ministre est sûrement pleine de bonne volonté, elle essaie bravement de défendre une loi indéfendable qui limite à 20 % les logements neufs accessibles aux personnes handicapées au lieu des 100 % prévus à l’origine. Un numéro d’équilibriste dont personne ne sera dupe.

Commentaires  

#1 jacotte86 11-02-2020 10:45
surtout pas les premiers concernés....les handicapées et leur famille! leur représentativité électorale n'est surement pas assez importante pour que l'on dépasse les bonnes intentions qui ne coûtent rien
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