À Varennes !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 22 janvier 2020 10:57
- Écrit par Claude Séné
Je ne crois pas que l’on puisse me suspecter d’une quelconque complaisance à l’égard du pouvoir et de son chef de file actuel, mais j’avoue trouver choquant le slogan entonné au cours d’une manifestation de gilets jaunes samedi dernier, où les participants célébraient à leur manière l’anniversaire de la décapitation de Louis XVI en clamant qu’on pouvait recommencer avec Macron. Si je combats résolument la politique désastreuse de ce président, qui accroît les inégalités, je ne souhaite pas pour autant la mort du pêcheur. Il me suffirait amplement qu’il plie les gaules et aille tendre ses lignes lucratives sous d’autres climats.
Ce mot d’ordre, qui me semble avoir été lancé sans humour, traduit un fait incontestable, la détestation et la haine que suscite le chef de l’état, à titre personnel, auprès d’une partie de la population. On n’entend pas de slogan hostile au Premier ministre, qui a pourtant pris des positions extrêmement dures dans le conflit des retraites par exemple. Il passe miraculeusement entre les gouttes alors que la plupart des membres du gouvernement, du moins ceux qui ne sont pas totalement inconnus du grand public, essuient quelques averses et pour certains, de véritables trombes d’eau. Si Macron concentre à ce point les réactions négatives, c’est d’une part parce que les Français ont bien compris qu’il exerçait un pouvoir absolu et solitaire, comme les Bourbons d’avant 1789, mais aussi parce qu’il laisse trop transparaître son mépris profond de la plèbe, à qui il faut tout expliquer, y compris comment traverser la rue pour trouver du travail.
Si les plus radicaux demandent la tête du président, non seulement de façon métaphorique, mais bien réellement, c’est parce qu’ils le rendent responsable, à tort ou à raison, de la détérioration du climat social et de l’aggravation des inégalités. Le pouvoir se gargarise des chiffres qui indiqueraient une amélioration de la situation de la France, tandis que les Français les plus pauvres, eux, constatent que leurs finances personnelles ne suivent pas le mouvement. Ce sont toujours les mêmes qui vont à la Rotonde ou ailleurs se goberger pendant que d’autres sont expulsés de leurs logements. Pire, les riches sont de plus en plus riches, et les pauvres, de plus en plus pauvres : 7 milliardaires français possèdent à eux seuls une fortune équivalant à 30 % des revenus des plus pauvres. Dans ces conditions, l’escapade privée du chef de l’état dans un théâtre parisien a été perçue comme la fuite du roi, arrêté à Varennes. Le peuple admet qu’il vaque à ses occupations, au château de Versailles ou au sommet de Davos, mais beaucoup moins qu’il se distraie quand d’autres réclament du pain au boulanger Emmanuel ou à la boulangère Brigitte. Et le petit mitron ? promis, s’ils en font un, on vous le mettra de côté.
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