L’auberge européenne

« Ici, on reçoit avec provisions » pourrait être la devise des élections européennes qui auront lieu le 26 mai. Le dévoilement des 30 premiers noms de la liste de la République en marche en est une parfaite illustration. Le but du jeu a visiblement été de picorer dans toutes les formations, y compris les plus contradictoires, pour débaucher des individualités ne représentant plus la plupart du temps qu’eux-mêmes, mais dont le nom ou l’étiquette seraient susceptibles de faire illusion auprès d’une catégorie d’électeurs. Il s’agit de faire croire que la mangeoire de son parti attrape-tout est mieux garnie que celle du voisin.

La prise de guerre la plus spectaculaire est évidemment celle de Pascal Canfin, que l’on est bien obligé de qualifier d’ex-écologiste, puisqu’il s’est senti obligé de démissionner de la présidence de WWF pour la France, afin de rejoindre la liste conduite par Nathalie Loiseau. Je ne vois pas pourquoi il fait montre de tels scrupules après avoir démontré qu’en réalité ses convictions ne le gênaient absolument pas pour participer au pouvoir, sans tenir compte des orientations politiques, passant allégrement de la gauche à la droite sans le moindre état d’âme. Ce proche de Nicolas Hulot, qui avait semblé échaudé par l’expérience malheureuse de son mentor au gouvernement Macron, ne tarissait pas de critiques sur le pouvoir depuis le départ du ministre de l’Environnement et son constat d’impuissance. Le voilà convaincu de la bonne volonté du président ? J’en doute. Si l’on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, l’ambition personnelle semble un levier auquel beaucoup de personnes sont incapables de résister, sans compter la vanité et l’orgueil d’exercer une fonction jugée prestigieuse. Il sera intéressant de voir comment il pourra composer avec le représentant des paysans de la FNSEA, par exemple sur le sujet du glyphosate. Ou bien avec l’ancien directeur de campagne d’Alain Juppé dont les convictions écologiques n’ont jamais sauté aux yeux de quiconque.

Cette défection de Pascal Canfin, que d’aucuns qualifieront de trahison, est une nouvelle preuve de l’éparpillement de la cause écologique. On n’a jamais tant parlé d’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique. La conférence de Paris a soulevé un espoir immense, même s’il a été vite douché par Donald, Wladimir et les autres. La sensibilité écologique n’a jamais été aussi populaire qu’en ce moment, et les représentants « officiels » de cette tendance n’ont jamais été plus divisés. Tout le monde ou presque se réclame des idées écolos. Le canal « historique » du mouvement a refusé toute alliance pour se présenter aux suffrages dans un superbe isolement, afin de pouvoir « compter ses voix ». Eh bien, il va être servi ! Le comptage sera vite fait, de la façon dont les choses se présentent. Une nouvelle fois, l’écologie politique semble vouée à une sorte d’impasse du fait de ses dissensions internes et de la lutte des égos.

Commentaires  

#1 jacotte86 27-03-2019 10:36
la prise de guerre de Bernard Guetta mériterait le détour…
comme dit Charline vanhoenacker dans sa chronique ce matin" il devait être bourré...je conseille de l'écouter en entier, c'est un régal
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