Conseil de guerre
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 27 octobre 2018 09:30
- Écrit par Claude Séné
Le gouvernement a mis les petits plats dans les grands en mobilisant le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, le ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer, et la ministre de la Justice, garde des Sceaux, Nicole Belloubet, pour organiser la riposte contre l’épidémie de vidéos montrant des professeurs menacés par des élèves. À moins qu’il ne s’agisse d’éteindre un début d’incendie provoqué par le déferlement de témoignages d’enseignants, confrontés à des violences physiques ou verbales, qui dénoncent le manque de soutien de leur hiérarchie, sous le mot d’ordre « pas de vagues ».
Ce vent de panique totalement disproportionné montre à l’évidence le désarroi du pouvoir devant une possible accusation de faiblesse, voire d’indulgence à l’égard des fauteurs de trouble. Les « solutions » envisagées en disent long sur la méconnaissance des problèmes réels qui sont posés à la communauté éducative. À qui fera-t-on croire que la présence policière physique dans les établissements scolaires puisse être de nature à dissuader les élèves de comportements inadéquats ? L’image de la police est tellement dégradée dans certains quartiers que les encadrants des élèves, professeurs et autres personnels dédiés, en sont à se demander si cette présence ne serait pas elle-même source d’incidents et de provocations. Ce que demandent les intéressés, c’est un renfort en personnel, oui, mais en personnel éducatif, pas répressif. Un meilleur taux d’encadrement, un abaissement du nombre d’élèves par classe, des moyens permettant des travaux en petits groupes, le financement des projets éducatifs, etc. Pas des képis, des armes et des gilets pare-balles ! Sans compter que les forces de police elles-mêmes se demandent bien comment elles pourraient faire face à ces nouvelles missions si elles leur étaient attribuées.
Pendant les premières années où j’ai été partie prenante de cette communauté éducative, la doctrine officielle pouvait se résumer à la sanctuarisation de l’école. Les difficultés sociales, les inégalités, les différences culturelles ou religieuses existaient évidemment en dehors du périmètre de l’enceinte scolaire, mais l’école de la République se donnait pour objectif l’égalité des chances pour que tous les enfants puissent, du moins en théorie, accéder au savoir, à la culture et viser une élévation sociale. Chacun laissait son bagage social à la porte de l’école pour devenir un élève parmi ses pairs. Cette vision, peut-être utopique, est en train de laisser la place à un monde régi par les lois de la jungle, où seuls survivront les plus forts, qui sont souvent aussi les plus riches. C’est dans cette logique de libéralisme débridé que l’on peut inscrire les projets gouvernementaux. On a renoncé à la sanctuarisation pour adopter la bunkérisation. L’école deviendrait une forteresse assiégée, à l’américaine. On n’attend plus que les portiques détecteurs de métaux et la distribution d’armes aux professeurs pour rejoindre Donald Trump.
Commentaires
la laîcité est vraiment mise à mal