Le bel âge
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 19 septembre 2016 10:37
- Écrit par Claude Séné
« J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie ». C’est par cette phrase que Paul Nizan débute son roman, « Aden, Arabie », s’inscrivant en faux contre une idée reçue qui veut que la jeunesse soit une période bénie des dieux. Ce mythe est symbolisé dans l’imaginaire collectif au travers de représentations de tous ordres, comme cette chanson populaire de 1935, interprétée par Berthe Sylva : « on n’a pas tous les jours vingt ans ». À cette époque, on est majeur (et parfois vacciné) à 21 ans seulement.
C’est donc dire qu’avant la majorité, la société ne vous considère pas comme un adulte à part entière, capable de prendre ses responsabilités, et notamment de voter. En contrepartie, vous bénéficiez du privilège de la jeunesse qui est censée être insouciante. Qui représente mieux qu’Arthur Rimbaud ce personnage de l’éternelle jeunesse, romantique à souhait, et qui revendique son droit à ne pas être sérieux quand on a 17 ans ? La vingtaine, c’est aussi l’âge de la flamboyance, le triomphe de la créativité, l’épanouissement des capacités physiques et la croyance en sa toute-puissance. On se croit immortel et l’on risque sa vie sur un coup de dés, quand on ne la brûle pas par les deux bouts. Cette génération s’illustre au travers du « club des 27 », ces célébrités du monde du spectacle, disparues à l’âge de 27 ans, généralement de mort violente. Citons pêle-mêle Jimmy Hendricks, Janis Joplin, Kurt Cobain ou plus récemment Amy Winehouse, sans oublier Brian Jones et Jim Morrison.
Mais ça, c’était avant. Je suis frappé de constater que l’actualité met de plus en plus souvent en scène des jeunes en pleine adolescence, et principalement âgés de 15 ans seulement. D’un côté, l’adolescence a tendance à se prolonger de plus en plus avec une entrée retardée dans la vie active et l’accès à un emploi, et de l’autre elle présente des comportements autrefois réservés aux adultes. Le phénomène le plus visible concerne la radicalisation de nombreux jeunes de 15 ans, garçons et filles, tentés par l’idéologie pernicieuse de l’état islamique. La plupart cherchent à rejoindre les zones de combat en Syrie, mais se font généralement refouler aux frontières, si bien qu’un nombre grandissant d’entre eux se laissent téléguider pour essayer de commettre des attentats sur le sol national. Au moins trois d’entre eux ont été écroués la semaine dernière pour association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste. Ces arrestations s’ajoutent à d’autres faits divers, tels que l’incendie possiblement criminel des calanques à Marseille, avoué par un suspect de 15 ans, le meurtre de Manon également âgée de 15 ans, commis par un camarade de classe de son âge, ou celui d’un autre adolescent de 15 ans et demi par un autre lycéen du même âge en Guadeloupe. 15 ans, un bel âge, vraiment ?
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