Pouce

En guitare sommaire « pouce, ça ne compte pas, pouce c’est pour rire, ah ah ! ah ah ! » J’ai décidé de faire une pause dans le flot continu de l’actualité monomaniaque dont je suis le premier à ne pas pouvoir me passer. Quand j’étais petit, car aussi bizarre que cela puisse vous paraitre, moi aussi j’ai été enfant, et que nous jouions au loup ou à toute autre de ses variantes, les règles prévoyaient une possibilité de récupération après une période d’intense activité en demandant une interruption momentanée de la poursuite, en dehors de la traditionnelle « baraque » dans laquelle on s’enfermait virtuellement à double tour, les fameux cric et crac.

Pour signifier l’armistice, il suffisait de brandir ses deux pouces tournés vers le haut, les autres doigts repliés vers la paume. Nous appelions ça « avoir ses caux » (orthographe non garantie). Une expression dont je n’ai plus retrouvé la trace depuis et dont l’origine m’est totalement inconnue. Plus qu’un cessez-le-feu, cette pratique assurait une sorte d’immunité provisoire à celui qui y avait recours. Impossible de le toucher tant qu’il gardait la posture des pouces levés bien en évidence. Alors, pourquoi ne pas rester tout le temps comme ça, bien à l’abri, épargné des risques que continuent à encourir les autres joueurs ? Mais précisément parce que se trouver « hors-jeu » est une position que l’on ne peut assumer éternellement. Le goût du risque, l’attrait du jeu sont plus forts que la crainte de se faire prendre.

Le pouce en l’air, bien plus tard, ce sera aussi le symbole de la liberté, celui de l’auto-stop, avant que la criminalité ne rende l’exercice aussi périlleux pour ses protagonistes. La liberté de découvrir des régions ou des pays inaccessibles sans cette forme de partage où l’on échangeait un moyen de transport contre un peu de conversation, la curiosité de découvrir des personnalités nouvelles. L’occasion pour les sédentaires de vivre une aventure par procuration, et la découverte du vaste monde, même s’il se limitait parfois dans mon cas à quelques dizaines de kilomètres.

L’important, dans cette affaire, c’est de bien montrer qu’il est hors de question de mettre les pouces, une expression dont la signification est évidente, mais dont l’origine est controversée. Si nous sommes dans une arène, alors il ne faut pas baisser les bras, et encore moins les pouces. Il faut au contraire se retrousser les manches.