La crise des vocations

Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, en visite dans la région de Calais, a répété pour la énième fois qu’il voulait renvoyer dans leur pays ceux des migrants qui n’avaient pas « vocation » à s’installer en France. D’après ce que l’on peut comprendre, ils ne sont pas légion à pouvoir revendiquer une vocation pourtant attestée par le long chemin de croix qui les a amenés jusqu’à ce cul-de-sac de Calais. À côté de leur parcours du combattant, les pèlerinages vers les lieux saints font figure d’aimables promenades.

Allez savoir pourquoi, ces ingrats ne demandent même pas à s’installer dans notre pays. Tout ce qui les intéresse, c’est d’aller rejoindre leur famille ou leurs amis en Angleterre. S’ils ont une vocation, c’est celle de traverser la Manche, par n’importe quel moyen, dussent-ils y laisser leur vie. Vous en chercherez, des prêtres prêts à mourir pour leurs idées, mais ce n’est pas le sujet. Le sujet, c’est que l’on a renforcé les obstacles à la traversée vers la terre promise, sans pouvoir freiner l’afflux de réfugiés, accentué par l’aggravation de la situation en Syrie. Le nombre de migrants coincés dans l’entonnoir de Calais a doublé en quelques semaines, alors qu’ils étaient déjà « accueillis » dans des conditions plus que précaires. Au pont que 800 personnalités ont lancé un appel pour demander au gouvernement de prendre des mesures pour que la simple santé et la dignité des personnes réfugiées dans la jungle soient préservées.

Les mesures annoncées par le ministre, l’ouverture de 200 places sous des tentes chauffées pour abriter les femmes et les enfants, ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. Le nombre de migrants à Calais ne cesse d’augmenter, ils sont plus de 6 000 actuellement bien que 1 500 personnes aient été renvoyées depuis le début de l’année. On a appris également que le centre de rétention était désengorgé au compte-gouttes par le transfert en jet privé vers d’autres centres de 5 personnes à la fois. Une mesure aussi inefficace que coûteuse. La France n’a pas le choix, puisque l’Angleterre joue les Ponce Pilate en la contraignant à faire la police pour son propre compte. Elle ne peut pas continuer à se déshonorer en laissant des êtres humains croupir dans des conditions inhumaines. Le centre de Sangatte, fermé en 2002 à l’initiative d’un certain Nicolas Sarkozy, s’il n’était pas parfait, devrait servir d’inspiration au gouvernement actuel.