Vacances en Roumanie

Bizarrement, la Roumanie n’est pas le pays dans lequel j’aurais spontanément envisagé de passer des vacances. D’ailleurs, j’ai la nette impression que le flux de visiteurs entre la France et la Roumanie penche assez nettement pour la venue en France de citoyens roumains fuyant la misère, par rapport aux ressortissants français souhaitant visiter la Roumanie. Mais j’ai peut-être tort, et mon jugement est sans doute altéré par le souvenir de la dictature des époux Ceausescu qui avaient mis leur pays en coupe réglée pour leur plus grand enrichissement personnel, avant d’être exécutés sommairement à l’issue d’une parodie de « procès » par des insurgés révolutionnaires.

35 ans plus tard, la Roumanie, si elle est encore perçue comme très pauvre, a cependant développé ses infrastructures et c’est dans une résidence « de luxe » que Mohamed Amra, le fugitif le plus recherché de France avait trouvé refuge après 10 mois de cavale. De son propre aveu, il prétendait s’y être rendu « en vacances », avec une désinvolture qui en dit long sur ses probables intentions de se refaire la belle dès que possible. En guise de vacances, on le soupçonne fortement de s’être rendu à Bucarest pour se refaire une nouvelle identité à grand renfort de chirurgie esthétique avant de s’exiler dans un pays où les narcotrafiquants sont légion, la Colombie, en vue de reprendre ses affaires, probablement. Cette attitude bravache au moment de son arrestation et son transfert à l’aéroport pour être extradé en France est un grand classique chez les délinquants de haut vol, mais ne sied pas du tout à un personnage dont l’évasion a entraîné la mort de deux surveillants, dans un engrenage qui ne devait rien au hasard. Mohamed Amra n’a rien d’un Arsène Lupin et encore moins d’un Robin des Bois.

Ses sourires ne lui vaudront aucune sympathie du public, tant ils expriment son autosatisfaction et son contentement de soi. Désormais, son histoire est connue et l’état français est prévenu. La prison de Condé-sur-Sarthe est parmi les plus sécurisées de France, et son arrestation et son transfert dans l’établissement pourraient préfigurer la mise en place du projet du ministre de la Justice de spécialiser une ou plusieurs prisons dans la détention de prisonniers particulièrement dangereux, notamment les gros narcotrafiquants, qui tentent de poursuivre leurs activités illégales depuis leurs cellules. Cela passe par une chasse effective aux téléphones portables, qui pullulent dans les établissements ordinaires, et sont souvent mis sur écoute. Même avec une vigilance renforcée, l’expérience montre que les détenus risquant les plus lourdes peines ne renoncent jamais à tenter de s’évader. Dans ce cas précis, Amra a visiblement bénéficié d’une organisation criminelle à son service, disposant de gros moyens financiers, ce qui explique son apparent détachement de l’incarcération qui l’attend.