Dame d’acier ou dame de cœur ?

Je ne sais pas trop ce matin sous quel angle attaquer mon propos. Ce qui est sûr c’est que depuis une semaine j’ai envie d’adresser un grand merci à Mme Merkel, pour l’acte de pure humanité dont elle a été capable en ouvrant grand les portes de l’Allemagne aux réfugiés. Avant cette position généreuse, j’avoue que j’avais plutôt tendance à la ranger dans la catégorie des femmes politiques qui ne se distinguaient justement pas vraiment de leurs congénères masculins. Je l’avais classée comme une petite sœur de la dame de fer, la trop célèbre Mme Thatcher dont la politique économique « libéraliste » avait réussi bien sûr à faire baisser le chômage, mais à affaiblir les syndicats et accroitre les inégalités sociales. De ce côté-là Angela  a fait aussi fort en instaurant un mécanisme de chômage partiel cofinancé par l’État fédéral, elle a évité une grande vague de licenciements, préservé l’emploi en permettant une économie florissante au pays, qui a été payée très cher par les classes les plus défavorisées, les inégalités se sont creusées avec Merkel, tout en laissant inchangé un noyau dur du chômage longue durée.

Ces deux femmes ont aussi comme point commun, d’avoir exercé trois mandats successifs à des postes les plus importants d’un gouvernement, et à avoir été considérées comme les femmes les plus influentes du monde politique. L’itinéraire de Mme Merkel est surprenant, faire sa biographie serait long, il est cependant intéressant de rappeler que fille de pasteur vivant en RDA, où elle fait les études de physicienne, elle fait partie d’un mouvement d’opposition chrétien, dont elle sera la porte-parole en 89. La Stasi mentionne son opposition au communisme et son appui à Solidarnosc.

Après la réunion des deux Allemagne, elle milite au sein du CDU (dont elle deviendra la première femme présidente en 2000 pendant 8 ans), elle sera ministre fédérale de la femme et de la jeunesse de 91 à 94, puis de l’environnement et de la protection de la nature et la sécurité nucléaire de 94 à 98 dans le gouvernement Kohl. Je n’ai pas trouvé mention d’initiative importante qu’elle aurait faite au sein de ces ministères, à part qu’elle a dénoncé les manifestations contre le transport de déchets nucléaires  et fait la promotion des tailleurs-pantalons de toutes couleurs. Elle sera la première femme de RFA élue chancelière en 2005, 2009 puis 2013, capable de faire des alliances avec le SPD ou le FPD  pour garder le pouvoir. Son soutien aux USA dans la guerre du Golfe, sa sévérité pour la Grèce, sa position ambiguë sur l’énergie nucléaire, ne sont que quelques exemples de plus de désaccords, mais même si de mauvais esprits l’ont accusée d’avoir une arrière-pensée de politique économique dans son ouverture aux réfugiés, car il est vrai que la main-d’œuvre étrangère est nécessaire en RDA , je préfère quant à moi penser, que pour une fois le cœur a parlé avant la raison, au point d’en faire oublier un moment ce qui peut nous séparer.

L’invitée du dimanche

Commentaires  

#1 Isabelle Guillou 27-09-2015 11:04
Toute l'analyse que tu fais est juste. Mais il ne faut pas oublier que dans la politique allemande de l'immigration Mme Merkel s'arroge le rôle plus facile du "good cop" et laisse à son ministre de l'intérieur, T. de Maizière, l'autre, moins enviable, du "bad cop". Mais il n'empêche: nous disons tous ici aussi "Chapeau" (en français dans le texte).
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