Le cabri
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 15 septembre 2015 10:59
- Écrit par Claude Séné
Le cabri ne saute plus. Comprenez que, depuis que le général de Gaulle a inventé la formule selon laquelle il ne suffit pas de dire « l’Europe, l’Europe, l’Europe ! » en sautant sur sa chaise comme un cabri, la construction européenne n’a cessé de s’élargir tout en perdant continuellement en cohésion ce qu’elle gagnait en volume de population. La crise ouverte par l’afflux de populations de réfugiés est en passe de démontrer, une nouvelle fois, l’incapacité des pays membres à se mettre d’accord sur une attitude commune à l’égard de ces malheureux venus chercher asile et refuge chez nous.
Le bel élan de générosité de l’Allemagne des premiers temps s’est brisé net sur le risque pour la chancelière de se couper de son électorat traditionnel. Non seulement l’Allemagne a dû fermer (provisoirement ?) la porte aux demandeurs d’asile, mais pour ce faire elle a utilisé la disposition de l’accord de Schengen qui prévoit la fermeture des frontières en cas de situation grave et inhabituelle. Un signal qui conforte les voisins polonais, hongrois, slovaques et tchèques dans leur intention, non seulement de ne pas accueillir ces réfugiés, mais même de leur interdire de traverser leur territoire.
La décision de rétablissement du contrôle à la frontière avec l’Autriche, prise par Angela Merkel, a pour but de gagner du temps, d’une part pour échelonner l’afflux de réfugiés, qui pourrait atteindre ou dépasser le million, et d’autre part pour tenter de convaincre les pays réticents de participer à l’effort commun. La suggestion du ministre de l’Intérieur allemand de procéder « à la prussienne » en réduisant les aides dont bénéficient les pays opposés à l’accueil, risque de se heurter à une résistance passive et à une force d’inertie qui a fait avorter la plupart des initiatives visant à renforcer la cohésion des états membres. Faute d’avoir approfondi l’Union européenne des débuts avant d’inviter d’autres pays à venir la rejoindre sur des bases claires et contraignantes, l’Europe s’est transformée en un « machin » presque ingouvernable dans lequel les seules décisions prises le sont a minima sur la base d’un consensus mou. Nous sommes très loin de pouvoir prendre les initiatives qu’exige la situation difficile des populations déplacées, tout comme d’ailleurs de définir une politique et une diplomatie communes à l’égard des pays belligérants, à l’origine de cet état de fait, par manque d’une gouvernance européenne digne de ce nom.
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