La politesse des rois
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 7 juin 2024 11:00
- Écrit par Claude Séné
Bon, d’accord, Emmanuel Macron n’est pas roi, bien qu’il en ait fréquenté un certain nombre depuis qu’il a été élu président de la République française. Et précisément, c’est en présence de Charles III d’Angleterre et de la reine Camilla, qu’il avait promis d’assister hier aux cérémonies franco-britanniques organisées au mémorial de Vers-sur-mer. Le « monarque républicain » s’est permis d’arriver avec 20 minutes de retard, faisant ainsi poireauter toute l’assistance, y compris leurs gracieuses majestés, qui, elles, étaient là à l’heure. Une attitude désinvolte choquante pour l’opinion publique anglaise, très attachée au protocole, dont fait partie, au premier chef, la ponctualité.
Le chef de l’état est coutumier du fait. En 2018 déjà, la porte-parole des députés LREM, Aurore Bergé, pressée de questions sur les défauts éventuels du Président, concédait qu’il était « parfois en retard », une litote cachant mal l’incapacité maladive d’Emmanuel Macron à tenir un engagement horaire. L’explication de cette attitude délibérée tient dans une remarque délivrée au Parisien en 2020 quand il disait : « je ne suis jamais en retard… puisque rien ne doit commencer dans moi ». On aurait tort de prendre cette phrase comme une boutade de la part de quelqu’un qui se veut « le maître des horloges ». On sait qu’Emmanuel Macron ne déteste rien plus que se faire dicter son agenda. Il prend son temps, par principe, et annonce ses décisions quand il le souhaite. Dans les réunions internationales, son retard systématique est plus ou moins bien toléré. Si un Jean-Claude Junker prend cela avec philosophie, voire avec humour, il prend le risque de se fâcher avec des personnages à la fois plus puissants et plus dangereux, tels que Vladimir Poutine en 2017, ou Xi JI-Ping en 2018, sur des questions subalternes le mettant en porte-à-faux sur les sujets importants.
Sous cette question qui peut paraître futile se cachent en réalité des rapports de pouvoir et de domination. Selon un journaliste du Point, si Emmanuel Macron le pouvait, il mettrait la France dans une montre à gousset, que lui seul pourrait consulter à sa guise et mettre à l’heure de son choix. J’ai connu un formateur qui procédait de la sorte en posant son « oignon » en évidence sur son bureau, mais qui débordait systématiquement son horaire malgré le rappel à l’ordre bien visible. Ce manque de respect du temps des autres avait le don d’agacer prodigieusement ses collègues dont je faisais partie. Aujourd’hui encore, je m’efforce d’arriver à l’heure à mes rendez-vous pour les mêmes raisons. Heureusement que le sort des armes et l’issue du débarquement n’ont pas été confiés à Emmanuel Macron ou son ancêtre en 1944, il aurait fait capoter à lui seul l’opération, parfaitement minutée quant à elle.