Melonite aigüe
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 6 juin 2024 10:56
- Écrit par Claude Séné
Les observateurs attentifs de la vie politique française, dont vous faites sûrement partie, n’ont pas manqué de relever l’attitude du Premier ministre quand il s’est permis de faire intrusion sur le plateau de Radio-France où la candidate de la liste qu’il est supposé soutenir était en pleine interview pour la campagne des Européennes. Naturellement, son temps d’intervention sera décompté et les 4 minutes qu’il a « dépensées » pour se faire valoir, alors qu’il ne figure pas sur la liste, seront, en pratique, prélevées sur le temps de parole de la tête de liste. On ne peut manquer de penser que Gabriel Attal juge sa parole meilleure et plus convaincante que celle de Valérie Hayer.
C’est une jeune fille du public qui a résumé le mieux cette arrogance en posant la question à la candidate sur le probable sexisme sous-jacent de cette intervention. Elle ne faisait que formuler une évidence, reprise par la suite par les professionnels de la politique, mais négligeait au passage un autre aspect, celui du complexe de supériorité qui a atteint toute la classe politique sous la forme du jeunisme exacerbé. Comme si la précocité dans l’engagement était un gage absolu de la justesse de ses convictions. La limite du raisonnement apparait très vite, puisqu’il amène à adouber un rival, d’ailleurs en tête dans les sondages, du fait de son jeune âge. Et puis cet avantage, si c’en est un, est tout sauf éternel, et Emmanuel Macron peut le constater quotidiennement. Alors, Valérie Hayer peut bien se féliciter officiellement de sa bonne entente avec « le patron », personne n’est dupe et l’opposition peut dénoncer à juste titre le rôle de paillasson dévolu à la candidate.
Mais le meilleur était encore à venir avec l’intervention de Rachida Dati au Sénat dans le cadre des questions au gouvernement, elle qui ne craint personne pour les déclarations les plus baroques, qu’on devrait lui pardonner sous prétexte de ses origines modestes. Cette fois-ci, elle s’est surpassée en rejetant la responsabilité de la bourde sur la présidente de Radio-France, qui aurait « contraint » le Premier ministre à s’immiscer dans l’émission de la campagne électorale. Même Gabriel Attal a failli s’en étrangler de rire jaune, tellement la ficelle était grosse. La ministre elle-même, sujette au fou rire, avait du mal à garder son sérieux devant l’énormité de la chose. Nous avons donc le choix entre deux théories aussi fumeuses l’une que l’autre : un Premier ministre omnipotent à l’image de son mentor présidentiel, ou au contraire impotent, se laissant dicter sa position par une Pédégère éphémère. Dans les deux cas, le contentement de soi prédomine. Bien que la saison ne soit pas encore pleinement lancée, le « melon » de ces politiciens prend des proportions insoupçonnées, qui n’attendent pas le nombre des années.