Le dernier clou

Vous l’avez sûrement remarqué. Je me suis abstenu jusqu’à présent de la moindre intervention sur le sujet des élections européennes qui tournent cependant en boucle sur la plupart des médias malgré une indifférence quasi générale du public visé. Je n’ai laissé paraître aucune préférence pour un candidat ou pour une liste, et je n’ai encore moins donné la plus petite consigne de vote, qui serait d’ailleurs probablement inutile étant donné le peu d’empressement annoncé pour un scrutin qui n’attire pas les foules en général. Ce ne sont pourtant pas les candidats qui manquent avec un nombre record de listes, la plupart n’ayant que très peu de chances de franchir la barre des 5 % permettant d’avoir au moins un élu au parlement européen.

La première remarque qui me vient à l’esprit concerne l’incongruité de se présenter à des élections européennes tout en n’adhérant absolument pas à l’idée européenne elle-même, et en prônant la sortie de la France de cette construction. Sur les 38 listes en lice pour cette échéance, il en est beaucoup qui défendent tout et n’importe quoi, excepté le fait de se mettre d’accord avec nos voisins sur une politique commune. Un peu comme si l’on briguait un poste de député national en annonçant par avance qu’on ne participerait pas aux débats et aux votes. Vous me direz que c’était un peu le cas du Front national avant qu’il vire sa cuti et ratisse très large chez les mécontents de tout poil, et vous n’aurez pas tort. Mais autres temps, autres mœurs, et bienvenue aux bisounours qui échangent leur vote contre un selfie avec un candidat ou une candidate qu’ils appellent de leurs vœux et par leur prénom, qui sera peut-être totalement dévalué dans quelques années.

Pour beaucoup de Français, la question européenne est secondaire. Ils ne comprennent souvent pas très bien les alliances entre formations qui aboutissent à des compromis où une poule ne retrouverait pas ses poussins, matérialisés par des réglementations dont souvent personne ne comprend plus la logique. Par contre, ils ont clairement identifié que le président Macron, son gouvernement et son parti étaient responsables de leurs difficultés, dont ils se défaussent sur l’Europe. Le pouvoir applique la même tactique de bouc émissaire en attribuant à la tête de liste, Valérie Hayer, leurs difficultés électorales. Contrairement à Olivier Faure, qui vient de déposer une réclamation auprès de l’ARCEP, je ne crois pas que l’allocution du président prévue jeudi soir constitue un avantage pour son propre camp, juste avant le scrutin. Au contraire, les intentions de vote pour la liste Renew n’ont pas cessé de baisser depuis que l’exécutif lui a apporté explicitement son soutien. L’intrusion maladroite du Premier ministre, en pleine interview de la candidate, a démontré son manque de confiance. Ce discours de Macron pourrait constituer le dernier clou pour sceller définitivement le cercueil de cette élection.