Le drapeau de la discorde

L’Assemblée nationale peut-elle rester en dehors des réactions de la rue concernant le développement de la guerre que se livrent le gouvernement israélien et les Palestiniens pris en tenaille dans un territoire de plus en plus restreint, malgré les appels des instances internationales à cesser les bombardements aveugles qui atteignent surtout les populations civiles ? Pendant que le ministre supposé s’occuper des questions de politique étrangère, Franck Riester, essayait laborieusement de répondre à une question adressée au gouvernement sur la reconnaissance éventuelle de l’état palestinien, un député de la France Insoumise a brandi un drapeau aux couleurs de la Palestine, sans dire un mot.

La réaction de la présidente Yaël Braun Pivet, dont les sympathies à l’égard du gouvernement israélien sont bien connues, a été immédiate et violente, au-delà de ce que sa fonction le demandait. Elle menaçait le député LFI des plus lourdes sanctions et les a d’ailleurs obtenues, grâce au soutien de la droite, Bruno Retailleau qualifiant LFI de « honte de la République », rien de moins. Le Premier ministre, Gabriel Attal, en a remis une couche le soir même dans un meeting pour tenter de sauver le soldat Valérie Hayer, en parlant de « spectacle navrant et désolant ». On notera au passage qu’il a fustigé Raphaël Glucksmann, qui talonne sa candidate, mais pas Jordan Bardella, qu’il doit estimer hors de portée. Pendant ce temps, le responsable de ce climat électrique qui a provoqué de vives réactions dans le monde entier, le Premier ministre israélien, reconnaissait du bout des lèvres « une erreur » probable, malgré toutes les précautions dont il se serait entouré. De qui se moque-t-on ?

Le ministre des Affaires étrangères, sauvé par le gong de l’incident de séance, a renoncé à répondre plus avant sur la position de la France, dont il ne décide à l’évidence pas, et c’est le président Macron, le véritable et seul décideur qui s’est chargé de l’exercice délicat de justifier l’injustifiable. La France ne reconnaitra pas l’état palestinien, tant que cet acte n’amènera pas mécaniquement la paix. Autant dire jamais, ce sera plus rapide. Le raisonnement d’Emmanuel Macron peut se ramener à la méthode du « supposons le problème résolu ». Supposons que Benyamin Netanyahou reconnaisse l’état palestinien et accède à ses demandes de souveraineté, en échange d’une paix durable, sur le modèle des accords esquissés à Oslo, et poignardés par un fanatique religieux israélien, alors la France sera prête à entériner les traités et pousser les négociations. Parbleu ! Encore heureux ! Alors que la mobilisation actuelle qui monte dans les opinions publiques, françaises, européennes et autres serait confortée par les démarches des états, à l’instar de l’Espagne, l’Irlande ou la Norvège qui viennent de prendre leur décision. Et cet atermoiement n’est justifié que par un caprice de chef d’État qui déteste qu’on lui force la main, même quand il serait d’accord.