« Quoi qu’il en coûte »
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 20 mai 2024 11:05
- Écrit par Claude Séné
Le retour de la formule magique utilisée par Emmanuel Macron à propos du Covid 19 pour manifester sa volonté de dépenser tous les crédits nécessaires pour faire face à l’épidémie m’a légèrement fait sursauter. Je me demande sincèrement ce que Louis Le Franc, Haut-Commissaire de l’état français en Nouvelle-Calédonie, entend par là. Il me semble que, même s’il en avait le pouvoir, le « super préfet » ne pourrait pas apaiser la situation en sortant le chéquier de la France en réponse à une crise existentielle entre les populations de l’archipel.
Alors, s’il ne s’agit pas d’enjeux financiers, que faut-il comprendre ? Que les 6 morts constatées depuis le début des émeutes ne seraient qu’un début, et que la répression devrait s’intensifier pour « rétablir l’ordre républicain » ? Cette formulation ambigüe est pour le moins maladroite, et décidément, Monsieur Le Franc ne semble pas être l’homme de la situation. Loin de se poser en médiateur, le haut-commissaire annonce la destruction des barrages tenus par les émeutiers, tout en admonestant du bout des lèvres les loyalistes qui se sont constitués en groupes de surveillance, comprenez des milices privées, constituées principalement de chefs d’entreprises ou de commerçants, prêts à en découdre pour préserver leur capital. Tout ceci ne peut que mal finir, compte tenu du nombre très important d’armes à feu en circulation dans les territoires concernés.
Un des points d’achoppement de la nécessaire discussion sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, c’est l’interprétation des résultats du dernier référendum de 2021, boycotté par les indépendantistes qui en demandaient le report en raison de l’épidémie du Covid alors en pleine expansion. Un report refusé par le gouvernement français, visiblement juge et partie dans l’affaire. Le non à l’indépendance l’emporte largement, mais la participation est faible. La quasi-totalité des 43 % de votants ne constitue pas un vote majoritaire d’adhésion pour rester dans la nation française. Le vote indépendantiste entre 2018 et 2020 atteignait presque la barre fatidique, et les règles en usage devraient tenir compte de la situation postcoloniale de l’archipel, qui reste sur la liste des territoires à décoloniser de l’ONU. L’Organisation maintient la Nouvelle-Calédonie dans sa liste année après année depuis 1986, et elle est la seule à pouvoir l’en sortir, si les institutions permettent au peuple autochtone de s’autodéterminer en toute connaissance de cause et en étant représenté équitablement dans les instances de gestion et d’administration. Toutes choses incompatibles avec les marches forcées imposées par l’état central pour figer la situation et préserver les intérêts économiques, tant nationaux que ceux des particuliers. Dans une situation devenue clairement insurrectionnelle, le plus urgent est d’attendre. Retirer la réforme constitutionnelle. Se donner le temps du dialogue, quand la paix civile sera de retour et que l’état pourra assumer ses fonctions régaliennes. Et ça, ça ne coûte rien, mais c’est précieux.