Rocambole pas mort
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 29 août 2015 11:00
- Écrit par Claude Séné
Normalement, je ne devrais pas aborder le sujet du supposé chantage contre Mohammed VI, le roi du Maroc, de la part de deux journalistes français, pour la bonne et simple raison que l’on ne sait pratiquement rien de cette affaire. Mais je ne vois pas pourquoi je serais le seul à éviter de parler de ce que je ne connais pas, malgré l’aphorisme de Coluche qui disait que quelqu’un qui n’en sait pas plus devrait être autorisé à fermer sa gueule. Alors, voyons, qu’est-ce qu’on ne sait pas ? On ignore le contenu du livre à venir sur le Maroc et son régime, à paraitre en 2016, qui serait si explosif.
Les journalistes français n’ont pas pour habitude, au contraire de leurs homologues américains, de soumettre les résultats de leurs enquêtes aux personnes mises en cause pour recueillir leurs réactions. Pour quelle raison, si ce n’est pas de l’extorsion de fonds, Éric Laurent et Catherine Graciet auraient-ils rencontré un avocat représentant le royaume ? Un royaume qui avait gardé une dent contre les journalistes déjà auteurs d’un brûlot contre le régime, dont les bonnes feuilles publiées par El Pays avaient été censurées en 2012. S’agirait-il d’un traquenard, ourdi par le pouvoir, pour se venger de ces empêcheurs de dictaturer en rond ? Ou bien seraient-ce les journalistes qui auraient voulu piéger le roi en démontrant qu’il était prêt à payer une forte somme, en l’occurrence 2 ou 3 millions d’euros, pour empêcher la sortie de révélations compromettantes ?
On apprend à cette occasion que Maitre Dupont-Moretti, célèbre avocat de causes à mon avis plus nobles, représente les intérêts du Royaume du Maroc, et il glisse une hypothèse, peu reprise par la presse, selon laquelle les deux Français pourraient avoir été « instrumentalisés par un mouvement terroriste ». Si je sais encore lire, cela voudrait dire que l’argent était destiné à financer un groupe pratiquant les attentats : lequel ? De quelle mouvance ? Les journalistes étaient-ils sympathisants ou victimes eux aussi de pressions ? On nage en plein délire, à mon humble avis. Mais Maitre Dupont-Moretti n’affirme rien, les gardés à vue n’ont pas fait de déclaration officielle, l’enquête suit son cours et aucune piste ne doit être écartée, selon la formule habituelle. Pour l’instant, je m’en tiendrai donc à une incrédulité globale, n’ayant aucune confiance dans le régime de notre ami le roi, qui perpétue la tradition familiale autoritaire sous des dehors un peu plus modernes.