Les douze heures de Saint-Denis
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 2 septembre 2023 11:02
- Écrit par Claude Séné
À quoi auront servi ces douze heures de discussion avec les représentants des partis politiques représentés à l’Assemblée nationale, à l’appel du président de la République ? À rien, selon les partis d’opposition, qui n’en espéraient pas grand-chose, et elles auront eu le seul mérite d’exister selon les partisans d’Emmanuel Macron, représentés par le porte-parole du gouvernement. On sait que le président adore ce genre de grand-messe, où il peut discourir à perte de vue et noyer ses interlocuteurs sous un flot de belles paroles qui n’engageront que ceux qui les croiront. Il aura fallu que François Bayrou fasse remarquer l’heure tardive pour que les discussions finissent enfin à 3 heures du matin.
Sur le fond, rien n’a vraiment changé. Le président est toujours à la recherche d’un consensus pour contourner le manque de majorité afin de faire passer sa politique profondément inégalitaire. Il sait qu’il n’obtiendra pas le soutien de ses opposants les plus déterminés, et même pas celui de ses alliés objectifs, les Républicains, qui ne veulent pas se dissoudre dans une nouvelle majorité où ils pèseraient assez peu. Le résultat le plus évident des tractations autour de ces discussions à l’école de la Légion d’honneur concerne le menu du dîner. La Nupes ne voulait pas de quoi que ce soit qui pourrait s’apparenter à un banquet, même républicain, et menaçait de le boycotter, sauf s’il s’agissait d’un simple dîner « de travail » selon l’expression consacrée. La formule retenue, avec au menu du saumon, sera finalement adoptée. Le public jugera s’il s’agit là d’un vrai plat de pauvre, mais passons.
Là où Nicolas Sarkozy dégainait une loi à chaque problème identifié, Emmanuel Macron propose un débat, un exercice qu’il maîtrise, et à défaut de convaincre ses interlocuteurs ou l’opinion publique du bien-fondé de ses actions, il peut se targuer d’avoir proposé quelque chose. Dans l’ensemble, cela marche plutôt. Les opposants, même les plus résolus, peuvent difficilement refuser le dialogue, sous peine d’apparaître comme sectaires. Ils y voient aussi l’opportunité de présenter des propositions, dont ils savent qu’elles ont peu de chances d’être reprises par l’exécutif, mais qui seront ainsi connues du grand public. Qu’adviendra-t-il de ce marathon médiatique, une fois retombée l’actualité ? Probablement peu de chose. Un compte-rendu sera adressé aux participants, qui pourront l’amender. Un séminaire gouvernemental devrait étudier les conclusions de la discussion avant une suite possible à cette première rencontre. Aucune date n’ayant été fixée, le projet a bien des chances de passer à la trappe. D’ici là, une nouvelle lubie présidentielle aura probablement pris le relai. Pourquoi pas les vingt-quatre heures du Mans ? Ah ! il parait que c’est déjà pris.