Trop d’impôt tue l’impôt

C’est ce slogan d’une banalité affligeante qui semble avoir été le moteur du candidat Macron depuis sa première campagne présidentielle, au point qu’il en fasse l’alpha et l’oméga de sa politique, le point fixe autour duquel devaient s’articuler ses choix et ses priorités. Il s’était alors engagé à ne créer aucun impôt nouveau, un mantra repris scrupuleusement par son inamovible ministre des Finances, Bruno Le Maire. Le Président avait d’ailleurs justifié son entêtement à ne rien céder sur l’âge de la retraite par le refus obstiné de renoncer à cet engagement, ce qui aurait, selon lui, endetté exagérément les générations à venir.

Emmanuel Macron avait raison sur un point : l’impôt a toujours eu mauvaise presse, du simple fait de son origine étymologique, qui affirme son caractère arbitraire, car il est imposé aux citoyens. On lui a souvent préféré le terme de contribution, qui souligne une forme de consentement, d’effort réparti sur l’ensemble de la communauté, permettant, dans l’idéal, une mise en commun des ressources disponibles en corrigeant les inégalités sociales. De ce point de vue, l’impôt le plus inégalitaire est celui qui s’applique indifféremment à tous les produits, sans tenir compte de la richesse ou de la pauvreté de celui qui les achète. Le prototype de cet impôt dit indirect est sans doute la TVA, dont le taux « normal » est actuellement de 20 %, ce qui représente une forme de racket de l’état, qui prélève, au passage, une part non négligeable d’une richesse produite par d’autres acteurs de l’économie, bénéficiant ainsi d’une rente de situation. Diverses circonstances ont cependant grevé le budget de l’état et l’a amené à creuser un déficit record, qu’il va devoir commencer à combler, avec les sous… du contribuable.

Pas d’impôts nouveaux, donc, mais rien n’empêchera le gouvernement d’augmenter ses « recettes de poche » telles que les taxes sur le tabac et l’alcool, au nom des exigences, réelles, de santé publique. Il peut aussi rançonner les sociétés d’autoroutes, qui, devinez quoi ? s’empresseront de répercuter leurs prélèvements sur les automobilistes. Il est aussi question de supprimer la détaxation des carburants non routiers, au grand dam des professions concernées, et de revenir sur l’avantage concédé au transport aérien, désormais décrié, en appliquant une taxe sur le kérosène comparable à celle qui touche la route ou la voie ferrée. L’imagination des fonctionnaires de Bercy fera le reste, et elle ne manque pas. Ce sont les arbitrages qui vont être compliqués. On dit que dans chaque niche fiscale se cache un chien, prêt à mordre la main qui l’a nourri. À force de vouloir contenter tout le monde et son père, ce gouvernement de plus en plus fantoche pourrait finir par mécontenter trop de catégories sociales et toucher ainsi les limites du miracle permanent lié à l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, au point de faire voter une motion de défiance entraînant sa chute.