French connection

Un enfant de 10 ans est mort à Nîmes sous les coups de feu de trafiquants de drogue réglant apparemment des comptes et se disputant le contrôle de leur quartier. Selon la famille de Fayed, celui-ci se serait trouvé « au mauvais endroit, au mauvais moment ». C’est une façon de souligner que ni cet enfant ni sa famille n’étaient impliqués dans le trafic de stupéfiants, et qu’ils ne participaient en aucune façon à la fusillade. Cependant, ce qui s’est produit ne doit rien au hasard ou à la malchance, mais découle de la démission des autorités, jusqu’au sommet de l’état, et depuis longtemps.

La filière française dans le trafic international de drogue est bien connue depuis les années 30. Elle a donné lieu en 1971 à un film américain célèbre : « French connection », dont l’action se situe principalement à Marseille, tout comme le film français de 2014, « La French ». En plus de 40 ans, rien n’a vraiment changé, ni dans la fiction ni dans la réalité qui l’a largement inspirée. On serait tenté de dire, au contraire. Sur le trafic, tout d’abord. Le commerce génère des profits énormes et fait « travailler » des dizaines de milliers de trafiquants à des degrés et des postes divers. Un simple guetteur est payé bien au-delà de ce que pourrait lui rapporter un emploi légal. Les jeunes se laissent prendre à ce miroir aux alouettes, préférant gagner gros tout de suite, même si ça doit leur coûter la vie avant de pouvoir en profiter à Dubaï ou ailleurs. Car le deuxième fléau engendré par cette manne financière, c’est la multiplication des armes. Pour quelques centaines d’euros, il est dramatiquement facile de se procurer une arme lourde, avec toutes les conséquences que l’on connait, dans cette guerre pour le contrôle des quartiers, et les profits qui en découlent.

Cette situation est connue, et je ne peux pas croire que l’état français n’a pas les moyens de lutter plus efficacement contre la circulation de produits stupéfiants et d'armes lourdes. Tant que l’action de la police sera orientée sur les petits consommateurs, les gros trafiquants pourront dormir tranquilles. On se contentera de quelques saisies pour faire croire à une lutte contre le système mafieux qui organise le trafic, et rien ne changera. Évidemment, la corrélation entre pauvreté et économie parallèle suggère que la solution à terme passe par une lutte contre les inégalités, mais le mal est ancien et profond. Il faudra du temps pour remonter la pente quand on a tant tardé. La prohibition renforcée et l’aggravation de l’arsenal juridique ne sont que des impasses si elles sont isolées, de même que la dépénalisation sauvage livrant la population au marché parallèle, comme maintenant, mais en pire. Faute de pouvoir traiter le problème, la dernière tendance serait de botter en touche en invoquant la démission parentale, nouveau bouc émissaire de tous nos péchés.