Drame estival
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 10 août 2023 10:51
- Écrit par Claude Séné
Tous les feux de l’actualité, sans jeu de mots, ont été braqués depuis hier sur cet incendie meurtrier qui a détruit un gite de vacances à Wintzenheim, près de Colmar en Alsace, causant la mort de 11 résidents sur les 28 qui s’y trouvaient présents. L’émotion a été d’autant plus vive que les victimes étaient de jeunes adultes déficients intellectuels légers, qui y passaient des vacances, permettant à leur entourage de souffler un peu. Les causes du sinistre ne sont pas encore connues, et une enquête devra déterminer si toutes les précautions d’usage avaient été prises.
Le président de la République a aussitôt réagi sur les réseaux sociaux, et la Première ministre, Élisabeth Borne, a immédiatement interrompu ses vacances, pour « se précipiter » au chevet des familles touchées par cette tragédie. C’est cette expression, entendue sur une chaîne d’information continue, qui a retenu mon attention. D’autant plus qu’une journaliste soulignait l’absence du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, si prompt cependant à manifester sa solidarité quand il s’agit de soutenir des policiers soupçonnés de violences illégitimes. Je n’y vois aucune forme de hasard. La Première ministre ne pouvait pas rater une telle occasion de manifester sa compassion sur un sujet aussi consensuel, grillant la politesse à son ministre tentant pourtant d’être sur tous les fronts.
Je ne doute pas de la sincérité de l’émotion manifestée par la cheffe du gouvernement à ce sujet, mais cela m’a rappelé une anecdote personnelle, dans mon activité de psychologue scolaire, quand une petite fille m’avait confié le désarroi de sa mère, qui s’occupait d’une personne âgée venant de décéder. Elle était triste pour la mamie, qu’elle aimait bien, mais surtout anxieuse pour les revenus familiaux, amputés brutalement de leur source principale. « C’est que ce n’est pas facile de trouver une grand-mère », me confiait-elle, à juste titre, apparemment. Pour le pouvoir en place, l’incendie et les morts qui en découlent sont évidemment poignants, et touchent la plupart des Français, mais en même temps, comme dit l’autre, quelle formidable diversion dans un contexte estival climatique morose dans certaines régions, une inflation qui ralentit à peine, poussant les ménages à dépenser le moins possible, et des grognes toujours latentes chez les policiers ou les urgentistes. Pour l’instant, on ne peut désigner aucun coupable dans le drame de Wintzenheim, mais que l’on accuse une négligence, une intention criminelle ou la fatalité, tous les ingrédients resteront présents pour susciter une émotion à l’égard de ces victimes, innocentes, forcément innocentes, aurait pu dire Marguerite Duras. Et surtout, l’état, sauf coup de théâtre, ne peut pas être incriminé dans cette affaire, et ça, par les temps qui galopent, ça n’a pas de prix.