D’une jungle à l’autre
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 25 avril 2023 09:48
- Écrit par Claude Séné
Je m’apprêtais à vous faire part de mon étonnement de ne pas entendre plus parler de la situation quand même préoccupante dans le cent-unième département français, théoriquement soumis aux mêmes règles que ceux de la métropole, bien qu’il soit situé à 9 000 km de Paris, celui de Mayotte. J’entendais tout juste aux informations qu’une opération de destruction de logements insalubres était sur le point de se produire et le discours lénifiant des autorités s’efforçait de banaliser ce processus, en soulignant les avantages pour la population locale, y compris les expulsés habitant des logements de fortune.
Le fait qu’il y ait eu la nécessité de faire appel à l’armée pour organiser cette opération baptisée Wuambushu, reprise en mahorais, aurait cependant dû nous alerter. Car c’est bien d’une reprise en main dont il s’agit. La périphrase pudique sur la nécessité d’un relogement cache en réalité la volonté du pouvoir central de détruire les bidonvilles qui se sont créés au fil du temps, constituant une sorte de jungle qui n’a rien à envier à celle de Calais en son temps, qui n’est pas totalement révolu, afin de déporter les populations qui y ont trouvé refuge et les obliger à revenir aux Comores dont elles sont pour la plupart issues. Le gouvernement met en avant la délinquance engendrée par des conditions de vie impossibles et le trafic ou le racket que subissent les Mahorais. Cependant, il ne propose aucune alternative sinon l’expulsion massive des immigrants et un retour au pays, dont les Comores ne veulent pas. Le gouvernement avait néanmoins décidé le passage en force, comme il semble en faire sa ligne de conduite la plus habituelle. Malheureusement pour lui, et heureusement pour ce qui reste d’humanité dans un monde toujours plus brutal, il a trouvé sur sa route un tribunal courageux pour s’opposer aux destructions prévues de cases dans les ghettos tant que des solutions de relogement et de mise à l’abri de leurs affaires n’auront pas été organisées. Le tribunal a estimé que les destructions ciblées fragiliseraient l’ensemble des habitations, et risqueraient d’entrainer l’écroulement de la totalité des bidonvilles voisins.
Deuxième coup dur pour ce gouvernement qui démontre son arrogance mâtinée d’amateurisme à l’image de son chef, qui plaisantait dès le début de son premier mandat sur les barques de pêcheurs qui ramenaient plus de migrants que de poissons, la fermeture du port comorien d’Anjouan, signant le désaccord entre les Comores et la France. Ces contretemps ont laissé le temps aux opposants et critiques de la position française de faire entendre leur voix. L’association Droit au logement a ainsi fait savoir qu’il dénonçait une opération « anti pauvres », destinée à chasser les habitants sans prévoir leur relogement. La ligue des droits de l’homme dénonce une stratégie de terreur. Et de la part du ministre de l’Intérieur, c’est l’occasion de montrer les muscles, pour peaufiner son image.
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