Une vocation tardive

Je dois le reconnaitre, je n’ai pas fait partie des supporters de Jacques Toubon quand il a été nommé en juin 2014 Défenseur des droits en remplacement de Dominique Baudis, décédé peu avant. Son passé ne plaidait pas franchement pour lui. Ce pilier de la Chiraquie avait à 73 ans occupé de nombreux postes ministériels sans laisser une image particulièrement progressiste. On se souvient de son passage à la Culture après l’irremplaçable Jack Lang quand on disait que c’était sa femme qui connaissait les artistes et les œuvres. Il aura aussi laissé une loi imposant des quotas de chanson française à l’occasion de son ministère à la Francophonie.

Mister All Good a également protégé Xavière Tibéri en tant que garde des Sceaux, c’était un exécuteur loyal des basses œuvres de la droite dans toute sa « splendeur », opposé à l’abolition de la peine de mort, et j’en passe. Qui aurait pu croire, même François Hollande qui a proposé sa candidature contre l’avis de ses conseillers, que ce personnage falot et sans envergure allait tenir son rôle au-delà des espérances de ceux qui l’ont nommé, au point parfois de les embarrasser ? Depuis un an, Jacques Toubon a multiplié les prises de position inverses de celles auxquelles on aurait pu s’attendre.

Cela a commencé avec la dénonciation des contrôles au faciès. Il a aussi pris position contre un maire qui refusait l’inhumation d’un enfant rom, a soutenu Christiane Taubira sur la réforme de la protection de l’enfance, défendu l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux célibataires. Bref, on nous l’a changé, et voilà qu’il demande un moratoire, et même une interdiction de l’utilisation des flashballs contre les manifestants ! Une position qui provoque un tollé dans la police, immédiatement soutenue par le Premier ministre, ancien patron des flics de France.

Et pourtant, Jacques Toubon parle d’or en soulignant les risques que cette arme « non létale » fait courir, du fait de sa dangerosité intrinsèque et de son imprécision. La démonstration en a encore été faite dernièrement avec ce jeune touché près des testicules, qui fait suite à un autre « accident » qui a coûté un œil à un manifestant. Je suggère aux policiers qui craignent d’être désarmés de remplacer leurs flashballs par des paintballs, beaucoup moins dangereux et bien plus ludiques, et j’attends avec intérêt la prochaine recommandation du défenseur des droits.