La blace de la Pastille
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 3 juin 2015 10:43
- Écrit par Claude Séné
Vous connaissez peut-être cette histoire placée en exergue de son premier roman par Patrick Modiano : Au mois de juin 1942, un officier allemand s’avance vers un jeune homme et lui dit : « Pardon, monsieur, où se trouve la place de l’Étoile ? » Le jeune homme désigne le côté gauche de sa poitrine. (Histoire juive.) La version contemporaine de cette parabole pourrait bien être la suivante : en 2016, un automobiliste allemand demande son chemin avec un fort accent tudesque, alors qu’il se trouve rue de Rivoli à Paris, et qu’il souhaite se rendre place de la Bastille et on lui répond : « sur le pare-brise, évidemment ».
Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, annonce en effet la création de 7 pastilles de couleur pour distinguer les véhicules selon leur degré de pollution. L’idée n’est pas nouvelle, puisqu’il existait déjà une pastille verte, instaurée en 1998 et abandonnée 5 ans plus tard, car trop peu discriminante. Cette fois, les meilleurs élèves, les véhicules électriques, seront distingués par une pastille bleue, les suivants étant classés, en fonction de leur âge et de leur motorisation, du vert écolo au gris de l’infamie. Rien de très révolutionnaire, si ce n’est la pénalisation du diésel, clairement désigné comme principale source de pollution aux particules fines tandis que les moteurs à essence font l’objet d’une certaine indulgence quant à leurs émissions de CO2 notamment.
Après l’échec de l’écotaxe, la ministre y est allée prudemment puisque la pastille ne sera pas obligatoire et sera gratuite les 6 premiers mois. Ce sont les municipalités qui seront chargées de mettre en place des réglementations coercitives en cas de besoin. Une façon de régler élégamment son différend avec Anne Hidalgo sur la circulation alternée à Paris. Par la suite, les pastilles de couleur qui entreront en vigueur en 2016 permettront de favoriser le stationnement et la circulation des véhicules « propres » au détriment des plus polluants. Un petit bémol, mais qui a son importance. Ce sont les automobilistes les plus pauvres qui seront pénalisés en priorité, ceux qui roulent, par nécessité et non par choix, dans des véhicules anciens à petit prix. Ceux qui ont les moyens de se payer des 4x4 ou des SUV énergivores continueront à acheter leur permis quotidien de polluer en toute bonne conscience, en attendant le tarissement définitif des énergies fossiles, qui n’est pas pour demain.
PS Le diabloguiste sera en congé pour une durée indéterminée pour cause d’opération. J’espère vous retrouver fidèles au poste très prochainement.