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De la neige en hiver !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 9 février 2021 10:32
- Écrit par Claude Séné
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On aura décidément tout vu. Y compris une vague de froid en plein hiver. Quand on vous dit, ma bonne dame, qu’il n’y a plus de saisons. Autrefois, on accusait la bombe atomique de dérégler le temps, mais les essais nucléaires n’ayant plus trop la cote depuis pas mal de temps, il faut bien envisager, plus sérieusement, que les écarts de température ont quelque chose à voir avec l’activité humaine et les rejets encore trop importants de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, et pas seulement celle d’Arletty.
Oui, de la neige, ce n’est pas extraordinaire, mais en Bretagne, si. Je me suis retourné sur mon passé pour me souvenir de la première fois que j’ai vu de la neige dans mon Finistère natal. Je pense que c’était pendant l’hiver 54, dont tout le monde a gardé la mémoire à cause de l’appel lancé par l’Abbé Pierre en faveur des sans-abris et des mal-logés. J’avais alors 10 ans, et je crois que ce matin-là, nous devions suivre un cours de français ou de latin, avec Mme Borde, qui était le professeur principal de notre classe de 6e du lycée Harteloire de Brest. L’atmosphère était calme, studieuse, pendant cette heure matinale de 8 à 9, légèrement soporifique pour des gamins mal réveillés, quand un élève, levant la tête de son cahier s’est exclamé, incrédule : « Madame ! il neige ! » avec un accent breton à couper au couteau, provoquant le branle-bas de combat de toute la classe, se levant comme un seul homme pour se masser devant les baies vitrées sur toute la longueur à gauche de la salle. Après quelques minutes de désordre et de brouhaha, chacun regagnait sa place et se remettait au travail, non sans jeter des coups d’œil furtifs pour s’assurer qu’on ne rêvait pas et que les toits alentour attestaient que la couche tenait, et même s’épaississait.
Et en effet, dès l’interclasse du midi les boules de neige volaient en rase-motte, et le soir de vieux cartons servaient de luges improvisées sur l’Allée verte. Je ne me souviens pas combien de jours a tenu cette neige, comme un cadeau du ciel, avant de se transformer en une infâme bouillie maronnasse, mais c’est la seule et unique fois où j’ai vraiment vu de la neige en relative abondance dans cette bonne ville de Brest que j’ai quittée une dizaine d’années plus tard. La Loire-Atlantique, où j’ai émigré alors, m’a parue nettement plus froide que ma Bretagne natale et j’y ai vécu quelques hivers rigoureux, au point d’être isolé dans la campagne profonde certaines années. Mais la sensation irréelle de mon premier contact avec les flocons est restée unique, et cette neige qui ne venait pas à moi, je ne suis pas allé à elle, sinon très rarement, et sans enthousiasme excessif.
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