Matraquage fiscal

Le terme a été souvent et abusivement employé par la droite pour qualifier la politique fiscale du gouvernement, ce qui pourrait passer comme une forme de reconnaissance d’une tentative de rétablissement d’un semblant de justice en la matière. Il y a eu en effet quelques avancées dans ce domaine, notamment grâce à la perspective de la levée du secret bancaire dans les pays les plus accommodants comme la Suisse. Le rapatriement de capitaux qui s’en est suivi a été une véritable aubaine pour Bercy, qui a accepté de passer l’éponge sur la fraude moyennant le paiement des impôts correspondants.

Mais il reste des contribuables honteusement exploités par le fisc français. C’est le cas de Gérard Mulliez, que je n’avais pas l’honneur et l’avantage de connaitre jusqu’à présent et qui a dû s’acquitter de la somme faramineuse de 135 euros au titre de l’impôt sur le revenu. Un revenu pourtant modeste, puisqu’il s’établit à environ un milliard d’euros par an sans compter sa fortune personnelle évaluée à 37 milliards. Je devrais dire la famille Mulliez, puisque le patriarche a fondé une association familiale pour gérer ses intérêts, qui sont nombreux. Une centaine d’entreprises, dont les enseignes Auchan, Décathlon, Kiabi, Leroy Merlin, Norauto, Saint Maclou, Boulanger, Phildar, Cultura, Kiloutou, Flunch, pour ne citer que les plus connues. Un groupe qui emploie 500 000 salariés et qui représente 80 milliards de chiffre d’affaires dans le monde. Grâce à une équipe de conseillers fiscaux top niveau, le taux d’imposition de ces sociétés ressort à environ 1 %. À titre personnel, Gérard Mulliez, comme une grande partie de la famille, ne paye pas non plus l’ISF puisqu’il a déménagé en Belgique à Néchin, comme Gégé et pour les mêmes raisons.

On se demande s’il n’existe pas une forme particulière d’allergie familiale à la fiscalité, à la manière de l’ancien ministre Thomas Thévenoud, puisque Gonzague Mulliez explique sans états d’âme n’avoir jamais rempli une déclaration d’impôts de sa vie entière. Notons quand même que le ministère de l’Économie, dans sa grande bonté, a pris la peine de recenser les principales arnaques fiscales qu’il a pu rencontrer jusqu’à présent et dont il fait savoir qu’elles seront l’objet de redressements. Selon le bon principe qui veut que tout ce qui n’est pas interdit soit autorisé, il ne reste plus aux optimiseurs fiscaux qu’à faire fonctionner leurs méninges pour permettre aux profiteurs de continuer à prospérer.