Toutes affaires cessantes
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 8 octobre 2019 10:41
- Écrit par Claude Séné
Vous n’aviez sans doute pas mesuré l’urgence et la nécessité de statuer sur la délicate question de l’immigration au point de bousculer l’agenda et le calendrier des députés, des sénateurs, du gouvernement dans sa plus grande partie, et de la presse, dûment convoqués pour en débattre cette semaine. Ce n’est pas comme si un évènement dramatique comme une catastrophe industrielle et environnementale, ou un attentat terroriste avait eu lieu, justifiant que l’on traite ces questions avant toute chose. Non, dans de tels cas, il est urgent de ne pas se précipiter et de prendre le temps de la réflexion.
La représentation nationale attendra que sa majesté des mouches juge que le sujet peut servir ses intérêts. Comment comprendre cette convocation du parlement autrement que par la volonté de reprendre la main à quelques mois des municipales et dans une séquence où l’exécutif est dans la tourmente et dépassé par les évènements ? Il s’agit visiblement d’agiter un chiffon rouge pour amuser la galerie et donner le sentiment que le gouvernement, et son véritable chef, le président, sont aux manettes et qu’ils savent ce qu’ils font. Pour bien montrer le caractère symbolique de la consultation des élus de la République, les discussions ne seront suivies d’aucun vote, laissant carte blanche au pouvoir de prendre les décisions ou de ne rien faire, en toute liberté. Le Premier ministre a même eu une formule admirable en déclarant qu’il n’avait pas « peur de réfléchir ». Quelle audace ! j’ai pensé en l’écoutant à cette phrase de Coluche : « on s’autorise à penser dans les milieux autorisés », mais Édouard Philippe dit ça sans rire. Nous non plus, d’ailleurs, parce qu’on sait que ce genre de sornettes débouche toujours sur des coups bas portés à la démocratie.
L’intérêt pour le pouvoir de ce genre de « débats », c’est d’offrir une tribune aux populistes de droite, en les laissant proférer des horreurs pour apparaitre comme des gens plus modérés, plus raisonnables, plus humains au bout du compte, tout en jouant sur la peur, voire la haine de l’étranger. C’est la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, qui se drape dans une belle générosité pour défendre le droit aux soins des immigrés, tout en laissant entendre que la France pourrait bien devoir mettre des restrictions à cette politique, pour faire plaisir aux populations qui croient aux bobards de prothèses mammaires offertes aux migrantes. Les formations politiques ne s’y sont d’ailleurs pas trompées, qui ont déserté les bancs de l’hémicycle à l’exception de leurs chefs, bien obligés de faire acte de présence. On peut compter sur une indifférence de l’opinion publique, pas dupe, mais qui sait qu’elle devra payer finalement les violons de ce bal des menteurs.