Un sommet de tous les dangers

La ville de Biarritz, qui va accueillir les chefs des 7 états les plus riches de la planète, a déjà commencé à se transformer en un vaste camp retranché, où les délégations nationales seront moins nombreuses que les forces de l’ordre mobilisées pour les protéger. Le ministre de l’Intérieur français sait qu’il joue sa tête sur le moindre incident qui viendrait ternir le faste de ces réunions entre puissants de ce monde et la France a donc tenu à mettre les petits plats dans les grands, sans regarder à la dépense.

Aux 13 000 policiers et gendarmes déployés dans la zone occupée, il faut ajouter les multiples compagnies de CRS et même l’armée, qui se tiennent prêts à toute éventualité. À part une attaque thermonucléaire, et encore, on ne voit pas ce qui pourrait menacer la sécurité des « invités », qui seront en réalité des détenus de luxe dans un bunker doré. Ils pourront admirer entre eux les paysages superbes et le littoral débarrassé de ses touristes superflus. Il faudra montrer une patte blanche comme neige pour franchir la ligne de démarcation et s’aventurer du côté du Casino et des palaces du front de mer. Pendant ce temps, les militants altermondialistes tiendront leurs contre-sommets aux alentours, en zone « nono », comprenez non occupée, sous très haute surveillance. Le barreau local des avocats a déjà prévu de mobiliser le ban et l’arrière-ban de ses effectifs afin d’assister, selon la loi, les multiples personnes qui ne manqueront pas d’être interpellées sous des prétextes les plus divers. On s’attend à une moyenne de 300 gardes à vue par jour pendant le sommet et à une abondance de mobiles « terroristes » permettant de limiter encore plus les libertés individuelles. Les interpellations « préventives » ont déjà commencé et ne feront que croître et embellir.

En réalité, ce ne sont pas tant les débordements éventuels de « black blocs » qui sont à redouter, que la répression aveugle qu’ils risquent d’entraîner. Nous avons encore en mémoire ce sommet du G8, qui s’est déroulé à Gênes en 2001, où la police a profité de l’occasion pour « casser du manifestant » en envahissant une école qui servait de dortoir aux militants et en tabassant tout ce qui bougeait. L’assaut fera un mort et de nombreux blessés et il faudra 16 ans de procédures pour établir les responsabilités. Je suis désolé, mais les conditions d’une bavure majeure sont également réunies à Biarritz : défaillances dans la chaîne de commandement, responsables fragilisés, épuisement des forces de l’ordre sursollicitées depuis bientôt un an, propagande massive contre les opposants quels qu’ils soient, assimilés à des casseurs et des terroristes. Tout ça pour permettre à quelques privilégiés de se pavaner au Pays basque, il est vrai magnifique.