La cerise sans le gâteau
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 26 janvier 2015 10:57
- Écrit par Claude Séné
Nous sommes tous Syriza. Enfin, presque tous. Rien qu’en France, la victoire du parti de gauche « à la grecque » était espérée par des formations politiques aussi variées et même parfois opposées que le Front de gauche et le Front national, pour des motifs différents. Le soutien à Syriza était aussi l’occasion pour Cécile Duflot de se rapprocher de Jean-Luc Mélenchon et de Pierre Laurent, asseyant une nouvelle fois sa formation écologiste entre les deux chaises du gouvernement et de l’opposition.
Cette nette victoire d’Alexis Tsipras en Grèce était souhaitée par Arnaud Montebourg, tandis que le tout récent commissaire européen Pierre Moscovici, pourtant du même parti que lui, a préféré soutenir le Pasok, son homologue grec, laminé par la montée inéluctable de la coalition de la gauche radicale. Une montée qui donne des idées à l’extrême gauche française, qui observe aussi avec intérêt l’évolution du parti Podemos en Espagne. Syriza doit une grande partie de son succès au sentiment anti-commission européenne qui a imposé aux Grecs, en compagnie du Fonds Monétaire International, une cure d’amaigrissement forcé, supporté par la population qui n’y était pour rien, tandis que les spéculateurs et les privilégiés qui avaient mis la Grèce en mauvaise posture n’étaient pas touchés. Syriza a su fédérer les mécontents, si bien que le parti d’extrême droite, Aube Dorée, est réduit à 6 % de l’électorat contre 28 % d’intentions de vote pour le Front national en France.
Les Grecs ont donc obtenu ce qu’ils souhaitaient en majorité (relative) : le parti du refus de l’austérité, comme une sorte de cerise pour atténuer l’amertume d’une situation très difficile où ils ont dû se serrer la ceinture. Le problème, c’est qu’il n’y a plus guère de gâteau pour la poser. En 6 ans le produit intérieur brut a diminué de près d’un quart, cependant que le poids de la dette explosait à 175 % de ce PIB. Rien d’étonnant quand on doit emprunter à un taux usuraire (jusqu’à 38 % au plus fort de la crise) alors que les économies fortes comme l’Allemagne et dans une moindre mesure la France, empruntent à taux quasiment nul.
Syriza aura fort à faire pour tenir ses engagements. Il devra obtenir un réaménagement de la dette, à la fois dans ses modalités et son montant pour espérer relancer l’économie, faire baisser un chômage actuellement de 25 % et remonter le salaire minimum au niveau d’avant la crise. Difficile, mais pas impossible, si la Commission européenne décide enfin de sauver le soldat grec pour ne pas sombrer avec lui.