Dévasté !

Pour ne rien vous cacher, l’écriture de cette chronique quotidienne ne serait pas possible sans l’aide efficace d’un correcteur orthographique un peu plus poussé que celui qui est fourni avec le traitement de texte de base. Il est déjà assez compliqué de sélectionner un sujet, de trouver un angle pour le traiter et de formuler sa pensée de façon aussi claire et intelligible que possible. Inutile de vous dire qu’entre les fautes de frappe et les erreurs pures et simples d’accord ou d’usage, le produit de mes cogitations ne serait pas digne du respect que je vous dois, et que je me dois à moi-même.

Donc, mon correcteur me signale de temps à autre que telle expression que j’emploie est en réalité un « calque » de l’anglais, une traduction littérale d’une expression étrangère, alors qu’il existe généralement un équivalent en bel et bon français d’origine contrôlée. C’est ainsi que nous sommes « dévastés » par un évènement tragique au lieu d’en être peinés, attristés ou affligés. La dépendance est devenue une addiction et les enfants maltraités sont désormais abusés. Les militants sont des activistes, ils sont concernés (inquiets) par notre avenir qui leur parait déceptif (décevant). Citons aussi les « nominés » à Cannes parmi l’audience éligible, y compris dans les pays émergents, impactés par ce phénomène. Ou encore, les prérequis qui ont squatté les maternelles quand les prescriptions remplaçaient les ordonnances chez les médecins, lesquels adoptaient les premiers la fameuse résilience, mise à toutes les sauces à présent.

Reconnaissons que certaines expressions ont acquis leur droit de cité à l’ancienneté, par exemple ce qui coûte un bras, ou une jambe, qui a été adopté et parfois transformé en peau des fesses, qui n’existait pas à ma connaissance dans l’original. Je passerai également sur les anglicismes purs et durs qui ont l’avantage d’être immédiatement identifiables sauf pour relever la tendance ridicule dans le milieu à la fois jeune et technophile à franciser sauvagement un mot anglais en le conjuguant, par exemple « j’ai upgradé mon ordi », pour dire qu’on l’a amélioré.

Je sais que tout ça fait un peu passéiste, voire conservateur, et qu’une langue est faite pour évoluer, mais j’ai la faiblesse de penser qu’employer le mot juste, si cela ne permet pas de remplacer la réflexion, a du moins le mérite de la favoriser. Cela ne m’empêchera pas d’aller me préparer un caoua, ou un café, selon mon bon plaisir.

Commentaires  

#3 Issbelle 02-04-2016 22:42
Pardon pour mon retard! Grande amoureuse de ma langue maternelle, je trouve ton billet sensas' (!). C'est pourquoi je veux ajouter que nous avons "emprunté" aussi des bijoux aux Gitans, Américains, Arabes et autres Russes, comme ton caoua: la tchatche, le punche, la baraka. Ils sont beaux, non?
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#2 poucette 29-03-2016 19:26
et moi qui croyais bêtement que ta prose remarquable n'avait pas besoin d'aide compte tenu de tes antécédents professionnels; .....ça ne m'empêchera pas de l'apprécier chaque jour.
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#1 Lalou 29-03-2016 10:25
Superbe!
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