La tête de l’emploi

Une étude récente du défenseur des droits et de l’organisation internationale du travail démontre que l’apparence physique et vestimentaire des demandeurs d’emploi influe grandement sur leurs chances de décrocher un travail, à compétence égale. L’enquête distingue les caractéristiques « inaltérables » telles que le poids ou les traits du visage, et les caractéristiques liées au style vestimentaire ou autres apparences « modifiables ». Bien que ces formes de discrimination soient explicitement interdites par la loi, les chômeurs rapportent de nombreuses expériences négatives, particulièrement les femmes, les obèses et les seniors.

On ne peut pas dire que ces résultats soient véritablement une surprise. Dans un marché de l’emploi où l’offre dépasse très largement la demande, les recruteurs n’ont que l’embarras du choix. Si certains ne se gênent pas pour expliciter, parfois cruellement, les raisons pour lesquelles ils ne retiennent pas telle ou telle candidature, la plupart d’entre eux sont probablement influencés à leur insu par l’apparence physique des candidats. Des études ont démontré que les élèves les plus beaux étaient surévalués par leurs enseignants, au détriment des plus laids. Plus encore, les « beaux » élèves bénéficiaient d’une prophétie autoréalisatrice leur accordant plus de chances de réussite. Une attitude proche de l’expérience de l’effet Pygmalion, où des rats de laboratoire voyaient leurs performances s’accroitre quand on leur attribuait faussement des qualités génétiques supérieures.

Dans certains emplois, il peut y avoir une raison objective à choisir une personne d’apparence agréable, ce qui se traduit généralement par le terme « présentant bien », par exemple pour des postes au contact du public. Une hôtesse d’accueil rentre dans cette catégorie et il n’est pas injustifié que l’entreprise cherche quelqu’un donnant une image positive de son activité. Pour mettre toutes les chances de leur côté, les demandeurs d’emploi ont tout intérêt à soigner leur apparence physique. Certaines agences de Pôle emploi ont proposé des ateliers de « relooking ». L’idée étant de chercher l’adéquation entre le style ou l’apparence du candidat et le profil du poste à pourvoir. Dans tous les cas, ou presque, l’accent sera mis sur le vêtement classique ou décontracté en évitant tout ce qui est atypique, tatouages, piercings, etc. Mais l’exercice a ses limites, tout comme les CV anonymes. Difficile de gommer une couleur de peau, un surpoids, un handicap, une origine sociale. Tant que le marché du travail restera une foire d’empoigne, les plus faibles continueront à être les victimes de cette lutte des places.