Chemin de croix
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 22 juin 2024 10:44
- Écrit par Claude Séné
« Monsieur le président, comment avez-vous pu nous mettre dans cette situation ? » C’est en substance (je n’ai pas retrouvé la citation exacte) ce qu’une habitante de l’île de Sein, pourtant favorable à Emmanuel Macron, lui a dit à l’occasion de son passage pour commémorer l’appel du 18 juin 1940 prononcé par le général de Gaulle. Cette apostrophe énoncée sur un ton égal de la part d’une personne plutôt BCBG, très loin d’une pasionaria exaltée, résume à elle seule l’étendue du désenchantement des partisans du président, et exprime le désarroi d’une population déboussolée par ses décisions, auxquelles personne ne comprend plus rien.
Et encore s’agissait-il d’un public trié sur le volet, tout entier acquis à sa cause a priori, au cours d’une cérémonie par essence consensuelle. Un autre degré était franchi quand un sympathisant glissait à Gabriel Attal qui faisait campagne pour sa réélection, qu’il fallait dire au président « qu’il ferme sa gueule ». Une opinion que semblent partager les nombreux conseillers en tous genres qui commencent à déserter l’Élysée en prévision d’une reconversion prochaine. Parmi eux, un certain Bruno Roger-Petit, qui fut un temps porte-parole de l’Élysée avant d’être rétrogradé au rang de « conseiller-mémoire » du président, et qui aurait émis, avec quelques autres brillants sujets de sa majesté, l’idée génialissime de la dissolution. Là où l’on sent le début de la fin, c’est lorsque les ambitions personnelles des courtisans prennent le pas sur la déférence due au monarque absolu. C’est le Rubicon franchi récemment par l’ancien Premier ministre Édouard Philippe, jusqu’ici la loyauté faite homme, qui a pris ses distances avec Emmanuel Macron qu’il accuse d’avoir dissous la majorité. C’est aussi le sauve-qui-peut chez les ministres, avec Gérald Darmanin qui devance l’échéance en annonçant son départ, ou Bruno Le Maire qui dénonce les « cloportes » des parquets de l’Élysée.
On voit par là que la classe politique a pris conscience du degré de détestation du président, dont la moindre apparition devient désormais contre-productive. Il semble le seul à ne pas s’en être aperçu puisqu’il continue à multiplier les prises de parole, y compris pour la fête de la musique. J’ai cru un instant qu’il allait ressortir l’accordéon de Giscard pour animer le petit bal musette improvisé pour les caméras. Il semble persuadé que sa personne suffit à attirer la sympathie et le vote des électeurs en sa faveur, comme au temps de ses débuts, où il était attendu comme le Messie. Il ne s’est pas rendu compte que désormais il devait porter son bilan comme une croix sur le dos, et qu’il ne représenterait bientôt plus que lui-même. Au point que la haine qu’il inspire à beaucoup de ses contemporains s’est étendue à la personne de son épouse, huée copieusement aux obsèques de Françoise Hardy.