Retour vers le futur

On a coutume d’expliquer le présent par des retours sur des périodes de l’histoire avec lesquelles nous croyons percevoir, à tort ou à raison, des similitudes. La montée de l’extrême droite, qui se confirme élection après élection, nous ramène, bon gré, mal gré, à ce qui semble un évènement fondateur de cette progression. Il s’agit du coup de tonnerre provoqué par l’accession de Jean-Marie Le Pen au 2e tour de l’élection présidentielle le 21 avril 2002, alors que les électeurs et l’ensemble des médias étaient persuadés que le match serait circonscrit au duel entre le président sortant, Jacques Chirac, et son Premier ministre de cohabitation, Lionel Jospin.

Déjouant tous les pronostics, le président du Front national devançait d’un cheveu le candidat « naturel » de la gauche, qui avait commis l’erreur de ne pas aller unie à cette échéance électorale. Jacques Chirac, que Lionel Jospin avait jugé « vieux, fatigué et malade » allait profiter de cette désunion en étant réélu triomphalement par 82 % des suffrages. Parmi les causes de l’échec de Lionel Jospin, devancé de moins de 200 000 voix au premier tour, on a pu pointer le retentissement spectaculaire d’un fait-divers, monté en épingle par la presse, divulgué trois jours avant le premier tour. Il s’agissait de l’agression d’un retraité de 72 ans, par deux jeunes hommes qui vont le frapper pour le racketter. Les images de celui que la France entière va appeler « papy Voise », tournent en boucle jusqu’à la veille du scrutin, créant ou accentuant un sentiment d’insécurité, qui a pu profiter au Front national. Un fait-divers atroce, l’agression et le viol d’une fillette de 12 ans, aggravé de mobiles antisémites, a secoué récemment la communauté nationale, qui a condamné unanimement ce geste de deux enfants du même âge ou presque. Curieusement, l’indignation du Rassemblement national, qui a pourtant des racines historiques dans une mouvance antisémite, a été jugée plus crédible que celle de la gauche, accusée, notamment LFI et en particulier Jean-Luc Mélenchon, d’hypocrisie, d’insincérité et d’antisémitisme profond et viscéral.

C’est aussi à 2002 que remonte le fameux « front Républicain » qui a permis la réélection triomphale et totalement imméritée du président Chirac, qui s’est empressé d’oublier tout ce qu’il devait au peuple de gauche qui avait fait barrage au Front national. La droite a fini par théoriser ce principe de sacrifice des idées adverses à son profit, en ne renvoyant jamais l’ascenseur, au nom de l’axiome : « ce qui est à toi est à moi, et ce qui est à moi, est à moi. »  Xavier Bertrand, qui doit son siège de président de la région des Hauts de France au sacrifice de la gauche régionale qui s’est retirée en 2015 pour faire barrage à Marine Le Pen, a clairement annoncé la couleur en prévenant qu’il ne voterait en aucun cas pour la gauche aux prochaines échéances. Voilà qui est dit.

Commentaires  

#1 jacotte 86 21-06-2024 14:22
on sait bien que l'histoire de répète...pas toujours comme on le souhaiterait hélas
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