Ce que veut vraiment Netanyahou

La situation humanitaire à Gaza n’en finit pas de devenir toujours plus catastrophique, avec des bombardements incessants de la population civile, qui se doublent désormais d’un risque de malnutrition voire de famine pure et simple, avec une aide internationale très insuffisante, dont les faibles moyens sont encore freinés par les difficultés d’acheminement. Aux Nations unies qui demandent instamment à l’armée israélienne d’arrêter les frappes aveugles et de faire preuve de retenue, Israël répond par son droit à répliquer à l’attaque du 7 octobre et à faire la guerre aux terroristes au pouvoir dans la bande de Gaza.

Officiellement, les buts de guerre de Tsahal, l’armée israélienne, n’ont pas changé. Il s’agit, selon le Premier ministre, d’obtenir la libération des otages encore détenus par le Hamas, et d’anéantir le mouvement à l’origine de l’attaque qui a fait environ 1200 victimes lors de l’attaque-surprise il y a près de 3 mois. Toutefois, Benyamin Netanyahou a changé l’ordre des facteurs, et cela change tout, en déclarant que la libération des otages ne serait possible qu’à condition de réaliser préalablement l’éradication totale du Hamas, et pour lui, visiblement, tous les Palestiniens de Gaza sont considérés comme des terroristes, puisqu’ils acceptent le pouvoir en place, qui n’a jamais été plus populaire. Il en conclut que la guerre durera encore des années et prépare l’opinion à s’y adapter, malgré ce qu’il appelle un « lourd tribut », les 167 soldats tués pendant les opérations militaires. Quand on sait que les victimes civiles des bombardements israéliens se comptent par dizaines voire centaines de milliers, on comprend mieux le dessein du dirigeant, dont le principal moteur semble être de se maintenir au pouvoir, quoi qu’il en coûte.

Benyamin Netanyahou est une sorte de miraculé de la politique qui est revenu aux affaires en créant une coalition très marquée à droite, qui s’appuie sur le soutien de petits partis religieux, autour du bastion traditionnel du Likoud. La guerre lui offre l’opportunité de durer, alors que la contestation de son action montait dans le pays. La question des otages l’a encore affaibli dans l’opinion, qui voit bien qu’il n’en fait pas une véritable priorité. La radicalisation des frappes, l’intransigeance en face des critiques nationales et internationales, lui tiennent lieu de politique. Il s’achète ainsi du temps, comme il l’a toujours fait dans le passé, en comptant sur l’usure de ses adversaires, ce qui lui a plutôt réussi jusqu’à présent. Le seul obstacle qui pourrait se dresser sur sa route serait le risque d’un lâchage de l’allié américain, mais celui-ci ne semble pas près d’arriver. Républicains comme Démocrates maintiennent un soutien sans faille à Israël. Au pire, les États-Unis s’abstiennent dans les votes concernant le Proche-Orient, et ni Joe Biden ni Donald Trump ne veulent prendre le risque de perdre une seule voix pour défendre les victimes civiles dans ce conflit.