Qui ne dit mot…

Vous connaissez la suite. L’accord trouvé à Dubaï au bout de la nuit à l’issue de la 28e édition de la Conférence des parties de l’ONU, la 28 COP, a été adopté par consensus. C’est-à-dire qu’aucun des 200 pays représentés n’a émis d’avis contraire ni ne s’est opposé à sa mise en œuvre. Ce qui est plutôt satisfaisant, si l’on veut considérer le verre à moitié plein, mais ne constitue pas non plus un vote d’adhésion. On est assez loin de l’immense espoir soulevé à la COP de Paris, présidée par Laurent Fabius en 2015. Il faudra néanmoins s’en contenter, en mesurant que l’on est passé tout près d’un constat d’échec.

C’était en effet une forme de gageure que de demander aux pays producteurs parmi les plus importants chez qui se déroulaient les travaux, de s’engager dans la voie d’un abandon progressif de leur source de richesse. Cette expression a d’ailleurs été bannie du vocabulaire final au profit d’un terme plus vague, celui de transition vers un monde sans énergies fossiles. L’objectif devrait être atteint en 2050, mais aucune mesure contraignante n’ayant été adoptée, rien ne garantit sa réussite qui repose sur la bonne volonté des états concernés. Pour y parvenir, il faudra naturellement développer les énergies renouvelables, ce qui est tout bénéfice pour les uns comme pour les autres. Plus contestable, la part grandissante du nucléaire dans le « mix » énergétique, qui n’est pas sans danger comme on le sait, et dont la ressource n’est pas inépuisable.

Pour autant, faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain ? Ce n’est pas l’avis de François Gemenne, un des membres les plus actifs du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui tire la sonnette d’alarme depuis des décennies, et qui salue cet accord comme inespéré, « presque historique ». Le diable se cache dans le presque. Car l’objectif derrière celui de la transition énergétique, c’est celui du réchauffement de la planète que l’on espère toujours limiter à un degré et demi, alors que les plus pessimistes pensent que nous atteindrons allègrement, comme dirait Claude Allègre, célèbre climatosceptique, les 3 ou 4 degrés, au train d’enfer où vont les choses. Il ne faut en effet pas oublier que la décarbonation de la production énergétique a pour objectif principal, au-delà d’échapper à la dépendance envers les pays producteurs, de conserver la plus grande habitabilité possible de notre planète en limitant le réchauffement et les dérèglements climatiques. Bien que le lien de causalité entre ces phénomènes ne soit pas encore établi de façon certaine, les aléas climatiques et l’élévation du niveau des mers et des océans ont de fortes chances d’être le produit de l’activité humaine. Peut-être faut-il écouter le message subliminal d’Emmanuel Macron, invitant la communauté mondiale à accélérer le mouvement, une manière de souligner que le compte, pour le moment, n’y est pas.