Mauvaise foi

La décision de Gabriel Attal de décréter hors-la-loi le port de l’abaya à l’école dès la rentrée prochaine est tout sauf une simple déclinaison de la réglementation de 2004 sur les signes religieux interdits dans les établissements scolaires. C’est une machine de guerre destinée à cliver l’opinion et à dresser les formations politiques les unes contre les autres en tentant de récupérer à son profit les inquiétudes de la population. Et le piège a parfaitement fonctionné. Au lieu de se demander comment l’école pourra mieux remplir ses missions, toujours plus nombreuses, afin de donner accès à tous les élèves à un enseignement de qualité, qui passe d’abord par la capacité de l’institution à mettre un enseignant devant chaque classe, les représentants politiques sont invités à s’écharper sur une question vestimentaire.

Le résultat : à droite et à l’extrême droite, on applaudit une initiative qui n’était guère demandée que par certains chefs d’établissement qui voulaient éviter d’être accusés de discrimination religieuse. Ils voulaient un cadre légal, ils l’ont. Mais cela ne résout rien. Il leur faudra toujours décider au cas par cas si la tenue vestimentaire des élèves est conforme ou non. Comment départager un vêtement ample et couvrant d’une véritable abaya selon la tradition, sinon par l’intentionnalité de celle qui le porte d’en faire un outil de prosélytisme en faveur de la religion musulmane ? C’est d’autant plus difficile que l’adolescence est la période de la vie où le désir d’appartenance à un groupe social est le plus développé avec des effets de mode et des signes de reconnaissance exigés par le groupe. On aurait probablement tort de faire de ce phénomène une question uniquement religieuse, même si cette dimension est évidemment présente.

Cette circulaire à venir va être ressentie par les principaux intéressés comme une brimade totalement arbitraire qui frappera les jeunes encore une fois, entretenant ainsi une victimisation déjà latente, et visant la religion musulmane, alors que précisément, celle-ci réfute le caractère religieux de ce vêtement. Les formations de gauche sont divisées sur la question, ce qui était sans doute le but principal de cette manœuvre de diversion pour phagocyter les débats de la rentrée. PS et PC sont majoritairement en faveur de l’interdiction, tandis qu’écologistes et insoumis y sont plutôt opposés. Les arguments des uns et des autres sont d’ailleurs recevables. La laïcité de l’école est un principe acquis depuis la loi de 1905 et il est important de la préserver. Mais les enjeux sont trop grands pour qu’on se disperse à légiférer chaque fois qu’une situation nouvelle apparait. On a eu ces débats à plusieurs reprises : à propos du foulard islamiste, puis du port du voile, que ce soit dans les écoles ou dans la sphère publique en général. À chaque fois, un nouveau compromis a été trouvé, mais rien ne remplacera le nécessaire dialogue avec les parties prenantes.

Commentaires  

#1 jacotte86 29-08-2023 11:08
le vieux stratagème fonctionne...diviser pour régner
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