Le temps du muguet
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 2 mai 2023 10:45
- Écrit par Claude Séné
Il est revenu, selon une chanson de Francis Lemarque, déjà ancienne, mais qu’on pourrait remettre au goût du jour. Cette édition 2023 de la fête des Travailleurs restera dans les annales comme celle de la réunification du mouvement ouvrier, où l’ensemble des organisations syndicales les plus représentatives se sont retrouvées derrière les mêmes banderoles dans un défilé commun, ce qui n’était plus arrivé depuis 2009. C’est un exploit à mettre à l’actif de ce gouvernement et du président de la République, objet de détestation du fait de son entêtement à n’écouter personne, y compris ses propres conseillers qui l’ont probablement mis en garde sur les conséquences de son acharnement à sauver une loi ni faite ni à faire.
La stratégie du pouvoir qui misait sur un essoufflement du mouvement, dû à la lassitude ou au découragement, a encore une fois fait long feu. Les manifestants étaient nombreux, presque autant qu’en janvier, festifs et déterminés. La mobilisation dure depuis longtemps, avec des hauts et des bas, mais reste à un niveau élevé, malgré les efforts de diversion qui ne font que renforcer la combativité des opposants. Emmanuel Macron sait désormais qu’il ne convaincra jamais une majorité de Français du bien-fondé de sa réforme, qu’elle laissera des traces profondes et durables, et il aimerait bien pouvoir tourner cette page funeste pour passer à autre chose. Pour escompter ce résultat, il a un deuxième fer au feu. Les 12 journées précédentes de manifestation se sont déroulées dans un calme impressionnant, alors que le pouvoir, comme à son habitude, adore mettre en avant les violences provoquées par des casseurs, espérant ainsi nuire aux revendications des manifestants pacifiques. Ces fauteurs de troubles avaient été jusqu’ici relativement discrets, ils se sont illustrés négativement hier, en perturbant le défilé et en s’en prenant aux forces de l’ordre. Malgré ces débordements, l’opinion ne semble pas basculer en faveur du gouvernement. Les contestataires, sans approuver les violences, ont tendance à les comprendre. Jusqu’au porte-parole du Modem qui, sur le plateau de BFMTV, rendait le pouvoir responsable de ces débordements par manque d’écoute.
Après avoir réunifié contre lui le mouvement syndical, il serait amusant que Macron réussisse à fracturer le semblant de majorité qui lui reste. Jusqu’à François Bayrou, pourtant peu suspect de tentations gauchisantes, qui déplorait dans le JDD que le gouvernement se soit « laissé prendre au piège », parce que « rien n’a été clairement expliqué ». Le président de la République aura beau jouer le pourrissement du mouvement, tenter d’opposer les contestataires entre eux, en divisant pour mieux régner, le malaise et la détestation qu’il a instillés dans la société ne disparaîtront pas d’un coup de baguette magique. On espère simplement que le mouvement social finira par faire éclore un mouvement politique cohérent capable de proposer une alternative crédible au glacis actuel.
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