Amalgame et récupération

La mort du maire de Signes, dans le Var, a soulevé une émotion légitime dans sa commune, où Jean-Mathieu Michel était élu sans discontinuer depuis 36 ans. Apprécié de ses administrés, il était bien connu dans son département, mais sa notoriété n’avait pas dépassé le niveau local. J’ai donc été un peu surpris par l’hommage appuyé qui lui a été rendu par les représentants de la République en marche, formation à laquelle à ma connaissance, il n’était pas particulièrement lié. Jusqu’au président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, qui s’est fendu d’une déclaration.

Ce sont, semble-t-il, les circonstances de sa mort qui ont provoqué cet intérêt subit de certains politiques. Le maire avait surpris deux ouvriers d’une entreprise de travaux publics en train de décharger illégalement des gravats en provenance de leur chantier. Il a été renversé par la camionnette au cours d’une manœuvre, et il est décédé sur place malgré les soins qui lui ont été prodigués. Bien que l’enquête semble indiquer l’origine accidentelle de cet homicide involontaire, des élus de la majorité ont fait le rapprochement avec les dégradations de permanences de leur mouvement, n’hésitant pas à accuser le climat détestable qui entoure la politique actuelle du gouvernement d’avoir causé indirectement la mort du maire de Signes. Ou comment transformer ce qui est probablement un malheureux accident en cause politicienne, un symbole de l’agressivité dont seraient victimes les tenants de la majorité. Jean-Mathieu Michel devient le porte-drapeau malgré lui de la cause présidentielle. Il est aussi présenté comme une victime de l’incivilité et de la lutte pour la nécessaire préservation de l’environnement.

Si l’on voulait appliquer partout ces méthodes à la limite de la malhonnêteté intellectuelle, il faudrait aussi se pencher sur la condamnation à 6 mois de prison avec sursis, 10 000 € d’amende et 3 ans d’inéligibilité, infligée à un député de la République en marche, pour abus de confiance. Il a détourné plus de 21 000 euros sur une durée de 3 ans. Ces fonds appartenaient à une association d’insertion et ont servi à des dépenses personnelles, de vêtements ou de repas. Ne pourrait-on pas en déduire que tous les élus de la majorité se rendent coupables d’abus de la confiance de ceux qui ont voté pour eux ? Qu’ils se rassurent. Leurs méthodes de voyou ne tombent pas sous le coup de la loi. Mieux encore, Mustapha Laabid ayant fait appel de sa condamnation, prononcée en son absence, il pourra rester député jusqu’au nouveau procès et continuer à voter pour le gouvernement, y compris pour ratifier des traités scélérats de libre-échange.