Au boulot !
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 18 septembre 2018 10:12
- Écrit par Claude Séné
Tout, ou presque, a été dit sur la dernière sortie du président de la République conseillant à un chômeur de traverser la rue pour trouver du travail, sous-entendant ainsi que son interlocuteur n’avait pas fait beaucoup d’efforts pour se sortir d’affaire. Alors que le jeune homme en question cherchait un emploi dans l’horticulture, il lui conseillait de se faire embaucher dans le secteur de la restauration ou du bâtiment qui manque de bras. Selon Emmanuel Macron, il suffirait de sa seule bonne volonté pour être instantanément recruté dans ces entreprises, aucune formation préalable ne serait requise.
Certains y ont vu un mépris du chef de l’état à l’égard des chômeurs, rendus responsables de leur situation précaire, et c’est une hypothèse rendue plausible par les précédentes déclarations du Président. Cela n’empêche pas d’examiner sérieusement le fond de la question. Macron a raison sur un point, c’est le déficit de main-d’œuvre dans certains métiers. Il y aurait entre 150 000 et 300 000 emplois non pourvus, ce qui est dommage, à la fois pour les entreprises et pour les salariés qui pourraient les occuper. Un simple calcul montre que cela ne résoudrait pas le problème des millions de sans-emploi qui ne trouvent rien dans leur compétence et dans leur entourage géographique. Sur quoi repose le raisonnement d’Emmanuel Macron ? Sur la flexibilité et la précarité. Vous ne trouvez rien à côté de chez vous et dans votre branche ? Changez ! Apprenez un nouveau métier, ou acceptez un emploi sans qualification. Toutes proportions gardées, Macron applique les principes de la révolution culturelle chinoise quand Mao forçait les intellectuels à un retour « salutaire » à la terre. Il fait fi des aspirations de ce jeune qui devrait être déjà content de travailler dans n’importe quel domaine. Il voudrait s’éclater au travail ? Et puis quoi encore ? Pourquoi pas un bon salaire pendant qu’on y est !
Emmanuel Macron feint de ne pas avoir remarqué les mutations profondes de la société. Au siècle dernier, les gens se contentaient de la place qui leur était attribuée dans la société par le sort et leur réussite personnelle. La plupart des parents visaient un échelon immédiatement supérieur pour leurs enfants dans le cadre d’une promotion sociale mesurée chichement. Bon an mal an, la reproduction sociale faisait son œuvre, sans grands remous jusqu’en 1968. De nos jours, les jeunes ont la prétention de faire un métier qui leur plait, ou qui rapporte bien, et si possible les deux. La téléréalité les conforte dans l’idée que l’on peut être riche et célèbre sans aucune qualité particulière et ils ont intégré l’idée que l’on ne fait plus un métier pour la vie. Il ne sera pas facile de les persuader de faire n’importe quoi à l’autre bout de la France pour un salaire de misère.
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