Les hommes du président

Connaissez-vous Mathieu Laine ? Non ? Moi non plus jusqu’à ce que je l’entende sur l’antenne de France Inter, et je dois dire que je n’ai pas été déçu par sa prestation. Si l’on se demandait encore d’où sortait la pensée libérale du président de la République, on peut commencer à s’en faire une idée assez précise. Ce monsieur, qui semble inspirer grandement Emmanuel Macron, est un « intellectuel libéral français » de 43 ans, qui a fondé et qui dirige un cabinet d’études et de conseil qui se flatte de compter des dirigeants de premier plan dans sa clientèle.

Il était interviewé sur l’antenne de France Inter et il a donc pu faire bénéficier les auditeurs de ses brillantes analyses et de ses propositions les plus percutantes. Il y en a une qui a rencontré un franc succès, c’est lorsqu’il a conseillé aux familles nécessiteuses de louer leurs poussettes entre deux portées. Les internautes hilares ont applaudi à cette suggestion lumineuse et lui ont fait un véritable triomphe, bien mérité. Comme quoi, la popularité d’un personnage politique tient parfois à peu de choses. Je sens que la cote de Macron va remonter en flèche si le président continue à faire confiance à des conseillers aussi bien inspirés et en phase avec les préoccupations des Français. Il assume évidemment sans le moindre complexe de favoriser les riches, dont on a besoin, pour éviter qu’ils ne s’installent à l’étranger, et bat en brèche toute solidarité nationale au-delà des mesures de simple survie. On ne sait pas qui inspire l’autre quand il reprend presque mot pour mot la formule présidentielle : « prendre de l’argent à des gens et le redistribuer à d’autres, ça ne marche pas ».

On voit donc que sur le fond, ils partagent la même idéologie qui se camoufle derrière un pseudo-pragmatisme. Mais ce qui est également frappant, c’est la communauté de ton dans le discours tenu par l’un et par l’autre, dans une sorte de mimétisme réciproque. Mathieu Laine, comme Emmanuel Macron, adore tenter de convaincre ses interlocuteurs du bien-fondé de ses positions. Il s’est oublié jusqu’à déclarer qu’il était capable de répondre à « toutes les questions » quand il voulait probablement dire « à n’importe quelle question », son lapsus révélant finalement sa pensée profonde. Jouant pour l’un de l’argument d’autorité que lui conférerait sa supposée compétence, et pour l’autre de sa position de pouvoir, ils assènent sans broncher l’expression des Anglo-saxons, connu sous l’acronyme de Tina, « there is no alternative », qui étouffe dans l’œuf la moindre velléité de contradiction. Nous avons raison parce que vous ne pouvez pas démontrer que nous avons tort. Les choses pourraient bien se gâter quand les tenants du pragmatisme devront reconnaitre que la situation des Français ne s’est guère améliorée.