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Une belle histoire

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Catégorie : Diabloguiste

Publié le samedi 28 avril 2018 10:21

Écrit par Claude Séné

Vous vous souvenez peut-être de cette chanson de Michel Fugain datant du début des années 70 et qui fut un succès, un tube comme on disait à l’époque. Je vous rafraîchis un peu la mémoire. Le texte de Pierre Delanoé racontait la rencontre de ces deux jeunes sur une aire d’autoroute. Lui qui remontait vers le Nord, elle qui descendait vers le Midi. « C’est un beau roman, c’est une belle histoire, c’est une romance d’aujourd’hui. » C’est une rencontre aussi improbable qui a eu lieu sur le 38^e parallèle dans la zone démilitarisée qui sépare toujours les deux Corées, à l’issue d’un conflit qui n’a jamais officiellement pris fin.

Depuis le cessez-le-feu et l’armistice de juillet 1953, la Corée du Sud et la Corée du Nord sont toujours techniquement en guerre et le régime dictatorial établi par la dynastie des Kim menace la paix mondiale par sa politique agressive de développement de l’arme nucléaire. Dans un tel contexte, l’entrevue du dirigeant du Nord, Kim Jong-Un, et le président du Sud, Moon Jae-in, a tout du conte de fées et de la divine surprise. Nous n’allons certes pas nous plaindre de ce que la mariée serait trop belle, mais on nous permettra de rester prudent et de remarquer qu’elle est toujours en noir. D’ailleurs, les bans sont encore loin d’être publiés, et il faudra que la dot, la dénucléarisation de la zone, soit conséquente pour espérer célébrer une union en bonne et due forme, la paix pour commencer, et pourquoi pas à terme une réunification, qui serait comme un bébé scellant les noces des jeunes mariés. C’est ce qu’espèrent les familles écartelées par une frontière hermétique similaire au rideau de fer et au mur qui traversait Berlin.

L’histoire semble trop belle pour être vraie. On s’attend confusément à ce que le carrosse redevienne citrouille au douzième coup de minuit, et l’on a du mal à croire que l’homme-fusée se soit transformé en Cendrillon. D’ailleurs, la chanson de Fugain m’a toujours semblée improbable. Par principe, à quelques exceptions près, les aires d’autoroute desservent uniquement un sens de circulation et ceux qui ont des trajets opposés n’ont pratiquement aucune chance de se rencontrer. D’ailleurs, la conclusion de cette belle histoire n’est pas particulièrement optimiste, puisqu’après cette brève rencontre, chacun a repris son chemin, l’un vers le brouillard, l’autre vers le Midi. Espérons que l’entrevue entre les dirigeants coréens connaitra un meilleur sort et ne restera pas lettre morte. Beaucoup reposera sur la capacité de Donald Trump à trouver un accord avec Kim Jung-Un sur une paix durable en échange de l’abandon du programme nucléaire coréen, ce qui suppose une autre stratégie que celle du bulldozer familière au président américain.

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