Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ?

Pour quelle raison est-ce que j’utilise le titre de cette comédie assez navrante dont le succès s’explique par le politiquement correct d’une dénonciation convenue du racisme ordinaire, flattant à bon compte des préjugés peu glorieux à l’égard des distinctions de couleur de peau ou de religion sous prétexte de les condamner ? Parce que le Président Macron, à l’occasion d’une réflexion sur l’attribution de la Légion d’honneur, remet en lumière une des notions phares de son action politique, celle du mérite.

En effet, attribuer une décoration telle que la Légion d’honneur à un personnage comme Harvey Weinstein se révèle après coup comme scandaleux. Il en va de même pour Bachar El-Asad, décoré malgré ses exactions contre son peuple déjà connues à l’époque. Donc, Emmanuel Macron veut réserver la Légion d’honneur à ceux qui l’auront vraiment méritée. Ce qui m’amène à la notion macronienne qui serait : « à chacun son mérite ». Celui qui bosse au lieu de foutre le bordel, mérite le meilleur, et notamment son costard, tandis que les fainéants, eux, n’auront que ce qu’ils méritent, c’est-à-dire pas grand-chose. Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? Rien ! c’est bien ça le problème. D’ailleurs, Coluche nous l’expliquait déjà, le monde est bien fait : Dieu a partagé, il a donné la nourriture aux riches, et l’appétit aux pauvres. Cette idéologie du mérite ne sert en réalité qu’à légitimer les inégalités sociales. La fiction veut que chaque citoyen aurait dans sa besace un bâton de maréchal, alors que l’observation la plus élémentaire démontre que les dirigeants sont tous issus du même moule de la petite ou de la grande bourgeoisie et ont fréquenté les mêmes grandes écoles.

La pseudo égalité des chances ne serait viable qu’à la condition de remettre les compteurs à zéro à chaque génération, ce qui impliquerait de supprimer l’héritage, voire la famille, une condition inacceptable. En outre, cela ne supprimerait pas les handicaps dits naturels, chacun n’étant pas doté des mêmes talents et du même caractère, contribuant à conférer à l’individu son « mérite », soit pour les services rendus à la collectivité, soit pour son profit personnel. C’est pourtant le fondement des écarts gigantesques de rémunération, alors que le dirigeant ne fournit pas nécessairement plus d’efforts que l’exécutant. C’est aussi la base d’un fonctionnement des institutions théoriquement démocratiques, mais en pratique oligarchiques, où le pouvoir se concentre entre les mains d’une petite caste qui tend à conserver ses prérogatives pour les transmettre à ses héritiers. Du point de vue des puissants que ce système favorise, aucune raison d’en changer. C’est pourquoi il ne faut pas être dupe de ce fameux « monde nouveau » qu’ils nous promettent.

Commentaires  

#1 jacotte 86 03-11-2017 11:30
de toute façon cette décoration ne signifiait plus rien complétement discréditée par le large éventail des bénéficiaires ,dont pour certain on se demandait ce qu'ils avaient bien faits pour la mériter!!! Macron peut bien essayer de lui redorer la face cela ne va pas émouvoir le citoyen lambda qui ne l'aura jamais...
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