Discipline

De même que les pieds font l’objet des soins les plus constants du fantassin, la discipline fait la force principale des armées, et il importe donc que tout supérieur obtienne de ses subordonnés une obéissance entière et une soumission de tous les instants. Les bataillons de nouveaux députés ne sont pas supposés faire exception à cette règle, si l’on en juge par les désignations des présidents de groupe à l’Assemblée nationale et en particulier celle du 4e personnage de l’état, qui occupera « le perchoir », un des postes les plus prestigieux de la République.

Nous remarquerons que discipline et disciple ont la même origine. Rien d’étonnant donc à ce que les nouveaux zélotes d’Emmanuel Macron suivent aveuglément les prescriptions de leur messie. Richard Ferrand est trop compromis pour être ministre ? Qu’à cela ne tienne, il fera un excellent président du groupe de la République en marche. Il sera seul candidat pour éviter les fausses notes, on n’est jamais trop prudent. Pas plus d’états d’âme pour désigner François de Rugy : l’Élysée a tranché, le groupe a suivi, à deux abstentions près de députés dont l’identité n’a pas été dévoilée, et l’Assemblée a entériné. C’est une définition de la démocratie tout à fait nouvelle en effet, que l’on appelait autrefois tout bêtement le fait du prince. Vous aurez remarqué que le président de l’Assemblée est encore un homme, tout comme les présidents de groupes, mais que voulez-vous, personne n’est parfait.

L’obéissance aveugle des marcheurs est pour l’instant totale. La discipline semble avoir pris le sens que lui attribuait Molière quand il faisait dire à Tartuffe : « Laurent, serrez ma haire avec ma discipline » qui désignait respectivement une chemise très rugueuse et un fouet destinés à faire pénitence. Au point que les militants d’En marche refusaient de prononcer le moindre mot auprès des médias pendant le défilé de la Gay pride, où ils n’étaient pas toujours les bienvenus, d’ailleurs. Les consignes ont été claires et appliquées à la lettre. Pas un poil ne doit dépasser, je ne veux voir qu’une seule tête. Le débat est un objet à usage interne et rien ne doit en transpirer à l’extérieur. Quand une règle est acceptée, elle s’impose à tous, etc. Ça va faire tout drôle à François de Rugy ou à Manuel Valls, dont la fidélité à la parole donnée n’a jamais été la qualité première et qui ont lâché sans vergogne le candidat désigné démocratiquement par les primaires de la gauche lorsqu’ils ont été battus. Je ne donne pas longtemps avant que des divergences apparaissent au grand jour, lorsqu’il faudra s’engager sur des décisions plus ou moins impopulaires, dont les députés devront rendre compte à leurs mandants.