Les belles familles

Vous vous souvenez du poème de Prévert : Louis I, Louis II… Louis X (dit le hutin)… Louis XVII, Louis XVIII… qu’est-ce que c’est que ces gens-là qui ne sont pas foutus de compter jusqu’à vingt ? Eh bien, nous verrons où s’arrêtera la dynastie Dassault, mais on ne pourra pas les accuser de ne pas avoir su compter. Dans la famille Dassault, je demande d’abord le grand-père, Marcel.

 

Issu d’une famille pas spécialement dans le besoin, il fait fortune dans l’aéronautique. Sous le Front populaire, il passe des commandes à son propre bureau d’études au nom de la société nationalisée dont il est l’administrateur principal. Un bon début. En 1976, sa société est au faîte de sa gloire grâce à des commandes d’état quand il est victime d’une extorsion de fonds de la part de son directeur financier, qui le menace de révéler la fraude fiscale généralisée opérée pour son compte s’il ne lui remet pas 8 millions de francs, une belle somme pour l’époque, que l’escroc emportera dans deux vulgaires gros sacs.

Une similitude étonnante avec l’affaire que l’on connait aujourd’hui et qui concerne le fils, Serge, qui a repris l’affaire familiale et les pratiques douteuses du père. On apprend que le comptable de Serge Dassault se faisait remettre de grosses sommes en liquide par un banquier suisse, et qu’il les transportait enveloppées dans du papier journal dans des sacs en plastique d’enseignes commerciales dans un louable souci de discrétion. Il les abandonnait ensuite dans un coin du bureau pour que leur destinataire les récupère. Il aurait ainsi transmis plus de 53 millions d’euros en provenance de comptes secrets ouverts au Luxembourg, au Liechtenstein ou en Suisse. Après ça, on s’étonnera que les deux premiers pays cités soient très haut dans le classement du PIB par habitant !

Quant au petit-fils, Olivier, il est encore un peu jeune (63 ans) pour succéder à son père dans une famille où l’on vit vieux et où l’on n’envisage pas de décrocher autrement qu’en passant l’arme à gauche. Il est cependant déjà député et président du conseil de surveillance du groupe. On peut supposer qu’il a été à bonne école, et surtout aux premières loges pour perpétuer, le moment venu, les traditions familiales. Une bien belle histoire, à continuer, donc, comme on aimerait pouvoir vous en narrer tous les jours.