Noir désir
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 4 novembre 2014 10:59
- Écrit par Claude Séné
À propos des manifestations qui ont vu le peuple Burkinabé s’opposer à la tentative de son désormais ancien président de se maintenir au pouvoir après 27 ans en manipulant une nouvelle fois la constitution, un homme, interviewé dans la rue, a employé le terme de « printemps noir » par référence au printemps arabe, pour montrer que le mouvement était profond et pouvait se généraliser aux autres pays africains.
Les similitudes avec les révolutions arabes sont frappantes. Comme en Égypte par exemple, le mouvement est né dans la rue, mais n’a pu se développer que grâce à la bienveillance de l’armée, non dénuée d’arrière-pensées. Depuis que la Haute-Volta coloniale a obtenu son indépendance en 1960, à l’exception de Maurice Yaméogo, son tout premier président, l’état est dirigé par des militaires, élus démocratiquement ou non, à l’image du capitaine Blaise Compaoré qui a pris le pouvoir en 1987 au moyen d’un putsch avant de se faire élire à 4 reprises avec une abstention massive de 74 % en 1991.
Poussé à la démission par les militaires et les manifestations de l’opposition, Blaise Compaoré laisse le pouvoir vacant, mais les prétendants ne manquent pas. Le général Traoré, qui s’était désigné comme chef transitoire de l’état, a finalement accepté de s’effacer devant le lieutenant-colonel Zida, autoproclamé à son tour chef de l’opposition. Une opposition qui craint que la période de transition s’éternise et qu’elle troque son tyran contre un dictateur. « On ne remplace (pas) le diable par un diablotin », proclamait une pancarte artisanale pendant les manifestations. C’est pourtant un grand risque pour un pays où la démocratie a été confisquée par des pouvoirs absolus successifs soutenus par les militaires, comme dans une grande partie de l’Afrique noire. L’Union africaine a donné 15 jours aux militaires pour organiser une passation de pouvoir aux civils, qui se chargeront de l’organisation d’élections démocratiques. Même si tout se passe au mieux, il n’est pas exclu que le Burkina Faso confie sa destinée à un militaire, le général en retraite Kouamé Lougué, ancien ministre de la Défense et populaire pour s’être opposé à Blaise Compaoré.
L’évolution sera scrutée à la loupe par l’ensemble du continent africain et par l’ancienne puissance coloniale, la France, en souhaitant que le Burkina Faso mérite pleinement son nom, qui signifie « patrie des hommes intègres ».