Tigre de papier

En qualifiant la Russie de « tigre de papier », une formule utilisée autrefois par Mao Zedong pour désigner son propre pays, les États-Unis d’Amérique, Donald Trump a, semble-t-il, visé juste. La formule a fait mouche si l’on en juge par les réactions du Kremlin, qui s’est évertué à réfuter les déclarations du président américain, qui a pris ses distances avec son homologue russe. Selon Trump, la Russie serait mal en point sur le plan économique, et sa situation financière en serait très affectée si les Européens cessaient de lui acheter du pétrole et du gaz pour se fournir aux États-Unis, ce qui est factuellement exact.

D’ailleurs, la Russie ne serait pas vraiment une superpuissance militaire, puisqu’elle s’est montrée incapable de conquérir le territoire ukrainien, en particulier Kiev, la capitale, dès sa première offensive et que depuis elle ne grignote que quelques kilomètres carrés sur son adversaire, là où Trump prétend qu’il suffirait d’une semaine pour achever la conquête. Emporté par un optimisme de fraîche date, Donald Trump imagine que les Ukrainiens, si les Européens leur achètent les armes américaines dont ils ont besoin, pourraient même gagner la guerre, et récupérer les territoires occupés illégalement par la Russie. Nous n’en sommes pas encore là, tant s’en faut. Poutine a effectivement dû constater que la résistance ukrainienne ne lui permettait pas pour le moment de mener une guerre de conquête à grande échelle, il doit donc s’adapter et il cherche visiblement à user ses adversaires en menant en réalité une guerre de terrorisme d’état.

Officiellement, et pour des raisons de propagande, les attaques aériennes de drones et de missiles envoyés journellement sur le territoire ukrainien ne visent que des objectifs militaires, ce qui est manifestement faux puisque ce sont essentiellement des immeubles résidentiels qui sont touchés. Le but recherché est clairement de terroriser les populations civiles, puisque les pertes occasionnées ne touchent que très peu de combattants en réalité, et visent à démoraliser les habitants de ces quartiers résidentiels. Pour le moment, cette stratégie russe n’a fait que renforcer la détermination ukrainienne, mais il serait dangereux de sous-estimer la capacité de nuisance de Poutine, qui a visiblement plusieurs fers au feu. Les récentes incursions dans l’espace aérien de pays membres de l’OTAN en sont une illustration. La Russie teste les capacités de réaction de ces pays, qui se sont contentés de mises en garde, alors que le Kremlin feint d’être l’agressé et menace d’une riposte à une fausse attaque. Les pays occidentaux, et notamment européens, doivent se tenir prêts à une nouvelle agression russe, sous n’importe quelle forme possible, au moment où Donald Trump souhaite bonne chance aux deux belligérants et se pose en commerçant pacifiste, à l’écart de la mêlée.