Ce n’est pas parce que…

l’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule ! Le président de la République n’était même pas né quand est sorti en 1975 ce film parfaitement dispensable de Jacques Besnard, dont le mérite le plus substantiel semble avoir été de permettre aux acteurs principaux : Bernard Blier, Jean Lefebvre et Michel Serrault, de payer leurs impôts. Si le film est un de ces « nanars » dont un acteur comme Michel Galabru disait qu’ils lui ont toujours permis de nourrir sa famille, son titre à la Audiard, lui, aura inspiré des générations d’hommes politiques, et notamment Emmanuel Macron.

Le président était en effet en vacances comme d’habitude au Fort de Brégançon, et, honnêtement, son absence ne semblait émouvoir personne. En ce qui me concerne, je ne m’étais même pas posé la question, et je crois que j’étais loin d’être un cas isolé. Mais les « hommes du Président » ont probablement une logique différente. Quand le pays était traversé par des évènements importants tels que les émeutes urbaines de la fin juillet, il était absolument urgent d’attendre, de retenir la parole présidentielle, de ne surtout rien dire qui puisse laisser croire à une mise sous pression de l’exécutif et organiser une rareté des réactions du chef de l’état. Alors qu’en pleine léthargie estivale, au moment où les Français qui le peuvent profitent de leurs vacances, et que d’autres rongent leur frein en attendant l’année prochaine, c’est la période idéale pour prendre la parole et occuper le terrain, semble penser le Président. « Si on parlait, hein, mais de quoi ? », comme le chantait Johnny Halliday dans « hey, Joe ». J’aurais voulu être petite souris et assister incognito à la séance de brainstorming qui a accouché du thème de l’allocution présidentielle du 17 août : la jeunesse !

On pourrait croire le président préoccupé par un état de déliquescence de sa majorité, qu’il tente désespérément d’élargir, sans le moindre succès. Que non point. Il en appelle aux jeunes, dont l’intérêt pour la politique en général, et la sienne en particulier, est proche du néant, pour les inciter à se détourner des chemins de la désunion et de la division, qui ne mènent qu’au chaos et à l’injustice. Ce n’est pas faux, mais les jeunes sont loin d’être idiots, et ils ont bien remarqué que le gouvernement, quand il disposait encore d’une majorité bête et disciplinée, n’a réussi qu’à accoucher de mesures iniques comme la réforme des retraites, dont ils seront les premiers à subir les conséquences. Et si les communicants du président sont toujours en panne d’idées pour les prochains discours, je leur suggère de se pencher sur la filmographie de Jacques Besnard, dont le film qui a suivi immédiatement, avait, lui aussi, un titre à rallonge : « la situation est grave… mais pas désespérée ». Vous avez quatre heures.